Focus : un facilitateur de la CEDEAO pour quoi faire ?

| 08.09.2015
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Focus : un facilitateur de la CEDEAO pour quoi faire ?
© DR / Autre Presse
Focus : un facilitateur de la CEDEAO pour quoi faire ?
Les recours contre l’éligibilité de certains candidats à la présidentielle du 11 octobre 2015 ont pris fin ce dimanche 6 septembre dernier. Trois recours, au total, ont été formulés par trois autres candidats à cette élection. Il s’agit de Victorien Tougouma, candidat du Mouvement africain des peuples (MAP), de Me Bénéwendé Stanislas Sankara, de l’Union pour la renaissance, Parti sankariste (UNIR/PS), et de Ablassé Ouédraogo, du Faso autrement...Et ce dimanche également, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) désignait un facilitateur pour le Faso. Pour faire quoi, aux dernières minutes ?


Les personnes contestées pour cette élection présidentielle (5 au total) sont Rock Marc C. Kaboré, du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), Djibrill Y. Bassolé, candidat indépendant soutenu par la Nouvelle alliance du Faso (NAFA), Yacouba Ouédraogo, de l’Union pour un Burkina nouveau (UBN), Ram Ouédraogo, du Rassemblement des écologistes du Burkina Faso (RDBEF), et, Salvador M. Yaméogo, du Rassemblement des démocrates progressistes (RDP).

L’on sait que Djibrill Y. Bassolé et Yacouba Ouédraogo étaient des ministres de l’ex gouvernement de Blaise Compaoré, et que Ram Ouédraogo et Salvador M. Yaméogo étaient partisans de la modification de l’article 37 de la Constitution burkinabé sur la limitation des mandats présidentiels, par leur adhésion au Front républicain, créé à cet effet.

Ce qui suscite polémique cependant est le recours contre Rock Marc C. Kaboré, candidat du MPP. Parmi les trois requérants, seul Me Sankara n’a pas introduit de recours contre Rock. Il évoque le fait qu’il n’y ait pas de preuve juridique ni politique qui le permette. Pour les deux autres, la candidature de Rock est déplacée dans le sens où il aurait été l’un de ceux qui ont incité Blaise Compaoré à modifier l’article 37 de la Constitution. Ceux-ci pensent également que ce n’est pas parce que les ténors du MPP ont parachuté dans l’opposition suite à leurs déboires au sein de l’ex majorité, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), qu’il faut leur donner le Bon Dieu sans confession.

Ces allégations sont commentées diversement par l’opinion publique nationale. Si pour certains, il est juste d’appliquer la loi à tous, sans demie mesure, d’autres par contre pensent que sans le MPP, l’opposition politique burkinabé, qui était présente bien avant, et qui ne se contentait que de mener certaines activités et condamner par des déclarations, sans pour autant inquiéter le parti au pouvoir, n’allait pas réussir à faire quoi que ce soit pour parvenir aux résultats de l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014.

Nul ne peut se donner la paternité de l’insurrection populaire...

Lors d’une de ses sorties, le Larllé Naaba, membre du Bureau exécutif du MPP, disait tantôt qu’il avait honte des agissements de certains politiciens. Il en voulait sérieusement au sieur Ablassé Ouédraogo. Mais il faut aussi savoir que l’opposition était réunie et que le MPP ne pouvait pas, tout seul, faire partir le régime. Cela a été toute une synergie d’actions concertées. Il serait alors injuste de tirer la couverture vers soi, pour se donner la paternité de l’insurrection populaire d’octobre dernier.
De toute évidence, le Conseil constitutionnel est le seul à pouvoir statuer sur quoi que ce soit en ces recours. Me Sankara, qui dit qu’il n’y a pas de preuve juridique ou politique contre la candidature de Rock, est surement mieux placé juridiquement pour avancer de tels propos, puisqu’il est avocat de profession, donc juriste. Mais en matière juridique, il y a aussi beaucoup de garde-fous qui font qu’une seule assertion ne saurait prévaloir.

Et le vrai problème réside dans les textes, puisque ces mêmes textes sont interprétés différemment par tous. Chacun y va de son argumentaire pour se donner raison. Mais de toute évidence, il va falloir trancher tôt ou tard, pour laisser les choses suivre leur cours. La destinée du Burkina Faso revient d’abord au Conseil constitutionnel, ensuite, aux électeurs, qui sauront choisir celui qu’ils veulent pour les gouverner.

Un facilitateur de la CEDEAO pour quoi faire ?

Ces élections suscitent davantage d’inquiétudes pour la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a ainsi choisi le président béninois, Thomas Yayi Boni, pour être le facilitateur auprès du Burkina Faso. Lors de la rencontre des Chefs d’Etats le week-end dernier, ceux-ci ont fermement critiqué encore l’exclusion aux élections de certains proches du régime de Blaise Compaoré. Cela n’est pas cependant comme l’envoyé spécial des Nations unies, Mohamed Ibn Chambas, qui était aussi présent entre temps au Faso et qui avait appelé à respecter la décision des juges constitutionnels.

Que compte donc entreprendre la CEDEAO en désignant Yayi Boni comme facilitateur au Burkina Faso ? On verra bien. De toute évidence, les dés semblent être jetés. Apparemment, rien ne pourra plus influer sur la détermination du peuple burkinabé à revenir sur sa position...

Le président en exercice de la CEDEAO, Maky Sall, par ailleurs président de la république sénégalaise, était parmi ceux qui sous-tendaient que Blaise Compaoré pouvait réviser la Constitution. Lui aussi, comme tant d’autres citoyens burkinabé, avait brandi des arguments, faisant penser que sans Blaise, le Faso ira à sa perte. Oubliant qu’en fait, nul n’est indispensable, dans la mesure que nous sommes toute une multitude, et que tout peut arriver à tout le monde un jour ou l’autre. Mais le monde continuera à tourner cependant, comme cela a toujours été. Comme on le constate, le syndicat des Chefs d’Etat est bien présent. Et solidaire jusqu’au bout des ongles !!!

Claire Lebœuf

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