Cela est d'autant plus vrai que la CENI, en voulant bien faire, se heurte à des esprits malins. En effet, alors qu'ils étaient censés conduire l'opération d'enrôlement à Yako, deux opérateurs de kits ont été pris en flagrant délit de fraude. Plutôt que de recenser des électeurs, ils passaient leur temps à distribuer les prospectus et les statuts et règlements intérieurs de la Nouvelle alliance du Faso (NAFA), du nom de ce parti qui a été, récemment, porté sur les fonts baptismaux. Heureusement que la vigilance des uns et des autres a permis de leur mettre le grappin dessus. En vérité, tout se passe comme si rien n'a changé dans ce pays qui, sous Blaise Compaoré, n'avait jamais connu une élection transparente digne de ce nom. Et ce qui vient de se passer à Yako est une preuve que si l'on n'y prend garde, la présidentielle d'octobre prochain ouvrira la voie à une grave crise post-électorale, avec son lot de violences et de morts inutiles, comme on en voit un peu partout dans les autres pays africains.
Il faudra que chaque acteur joue sa partition, en évitant des comportements de nature à nuire à la paix sociale
C'est pourquoi la CENI, aidée par les autorités de la transition, doit ouvrir l'œil et le bon. Car, comme le disait si bien le professeur Laurent Bado, « le pire est devant nous ». Il faut de la fermeté contre tous les fautifs car la vraie fraude, on le sait, se prépare toujours pendant la période de recensement. Soit on recense même des morts que l'on fait voter le jour du scrutin, soit on commet des erreurs exprès sur les noms des militants reconnus pour être dans des partis adverses. Ces pratiques, on en a vu dans ce pays de par le passé. En tout cas, pour que plus rien ne soit comme avant, il y a lieu de sanctionner ces deux opérateurs de kits pour l'exemple, afin que cela dissuade tous les autres apprentis sorciers tapis dans l'ombre. Car, peut-être que ce qui s'est passé à Yako n'est que la partie visible de l'iceberg. Rien ne dit qu'il n'y a pas d'autres opérateurs de kits stipendiés qui travaillent à la solde d'autres partis politiques. Du reste, une chose est sûre, si ces deux opérateurs de kits indélicats ont pu s'adonner à un tel exercice à Yako, on peut croire qu'ils ont eu la couverture de certains responsables. Et à l'allure où vont les choses, on finira par donner raison à tous ceux qui pensent qu'il urge de renouveler la CENI.
Pour tout dire, si l'on veut que le jeu politique soit sain et que le Burkina ne sombre pas dans le chaos après le 11 octobre prochain, il faudra que chaque acteur joue sa partition, en évitant des comportements de nature à nuire à la paix sociale. C'est à ce prix que l'on pourra réussir la transition en cours.
SIDZABDA