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Elections: la pression sur le Conseil constitutionnel

| 17.08.2015
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Elections: la pression sur le Conseil constitutionnel
© © Leonard Bazié / Présidence
Elections: la pression sur le Conseil constitutionnel
Ceux qui avaient des recours à formuler devant le Conseil constitutionnel en lien avec les listes de candidatures aux législatives ont pu le faire à la date butoir du 15 août 2015. On se rappelle bien, c’est par arrêté n°059/CENI/SG portant publication des listes de candidatures pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale le 11 octobre 2015 et signé le 12 août 2015 que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avait procédé à la publication des déclarations de candidatures. Ouvrant ainsi une période contentieuse en rapport, entre autres, avec l’éligibilité de candidats. Les uns et les autres avaient 72 heures pour acter leurs recours, à compter de la date de publication des listes.


Bien d’aspects devraient être concernés par les recours mais à l’heure du bilan, en tout pour ce qui nous a été donné de constater, seule la question de l’éligibilité en rapport avec le Code électoral a été posée. Ignorant, et cela est normal, les caractères moraux et éthiques de certaines candidatures.

En effet, en découvrant l’identité de certains candidats sur certaines provinces, l’on se rend compte d’une certaine malhonnêteté ou fourberie des partis. Il s’agit des candidats fabriqués juste pour bénéficier de la subvention de l’Etat. On retrouve également des candidatures à moralité douteuse: délinquants récidivistes; coupables de légèreté de mœurs; détournements de fonds. Etant donné qu’apparemment, les questions morales et ethniques ne devraient faire invalider aucune liste de candidature, voyons les dispositions du code électoral pour lesquelles, la haute juridictionnelle constitutionnelle pourrait avoir le sommeil troublé.

Selon l’article 193 du Code électoral voté par le Conseil national de la Transition (CNT), «le recours contre l’éligibilité d’un candidat ou d’un suppléant peut être formulé devant le Conseil constitutionnel par tout citoyen dans les soixante-douze heures suivant la publication des listes des candidats». Selon la disposition de l’article 166 de la loi, «sont inéligibles les individus condamnés, lorsque leur condamnation empêche d’une manière définitive, leur inscription sur une liste électorale. Les individus dont la condamnation empêche temporairement l’inscription sur la liste électorale sont inéligibles pendant une période doublée de celle durant laquelle ils peuvent être inscrits sur la liste électorale. Sont en outre inéligibles: – les individus privés par décision judiciaire de leurs droits d’éligibilité en application des lois en vigueur; – les personnes pourvues d’un conseil judiciaire; – toutes les personnes ayant soutenu un changement anticonstitutionnel qui porte atteinte au principe de l’alternance démocratique, notamment au principe de la limitation du nombre de mandats présidentiels ayant conduit à une insurrection ou à toute autre forme de soulèvement».

Ces dispositions ont été condamnées par la Cour de justice de la CEDEAO qui a estimé, le 13 juillet, que le Code électoral, dans sa disposition qui stipule que «toutes les personnes ayant soutenu un changement anticonstitutionnel qui porte atteinte au principe de l’alternance démocratique, notamment au principe de la limitation du nombre de mandats présidentiels ayant conduit à une insurrection ou à toute autre forme de soulèvement», viole les droits de citoyens à la libre participation aux élections.

Depuis la décision de la Cour, chacune des parties a tiré la couverture de la victoire sur soi. D’un côté, l’ex-majorité, qui croit qu’avec ce verdict de la Cour, les articles incriminés du code sont caduques et donc n’ont aucune incidence sur sa participation aux élections. De l’autre, des mouvements des insurgés qui estiment que le Burkina Faso est un Etat souverain et que donc, rien n’est contraignant dans le respect du verdict.

Le gouvernement avait dit prendre acte. Et enfin le CNT a pris acte du fait que le gouvernement ait pris acte.

On en était resté là, quand les candidatures aux législatives ont ramené logiquement le débat sur la table. Sur la base du principe de l’inéligibilité de toutes les personnes ayant «soutenu un changement inconstitutionnel portant atteinte au principe de l’alternance démocratique», des OSC et des partis politiques ont déposé des recours en annulation contre des candidatures de l’ancienne majorité et même de l’opposition, notamment le MPP et l’UPC.

Il n’en fallait pas plus pour provoquer le courroux d’Eddie COMBOIGO, président du CDP et ses camarades qui, en filigrane, ont dénoncé les recours et mis la pression sur Kassoum Kambou, le président du Conseil Constitutionnel et ses collègues.

Dans la réalité, l’ex-majorité ne fait pas confiance au Conseil constitutionnel qu’il juge être partisan. Pour elle, les juges sont en train de travailler pour un parti politique. Les menaces sont clairement dévoilées: le CDP n’acceptera pas une décision du Conseil constitutionnel tendant à invalider certaines de ses candidatures. Il prévoit au cas échéant, attaquer le Conseil constitutionnel devant la juridiction de la CEDEAO qui a, dans un premier acte, invalidé des dispositions du code électoral.

Mais en face, du côté des insurgés en particulier, la réplique ne faiblit pas. Parce que certaines personnes de premier plan auraient joué un rôle négatif qui a conduit à l’insurrection populaire d’octobre 2014, il n’est pas question qu’elles soient autorisées à participer aux élections prochaines. Les positions sont inconciliables. Le «consensus impossible» est entre les mains du Conseil constitutionnel. Encore faut-il que les esprits soient dans les dispositions d’accepter les verdicts des juges. Ce qui n’est pas le cas.

Wendpouiré BALBONE

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