En réaction à ce qu’ils considèrent comme une décision «arbitraire et illégale», le CDP et ses affidés (hormis l’ADF/RDA qui, par la voix de son président, dit s’incliner devant cette décision) lors d’un point de presse animé le lendemain mercredi 26 août, ont sorti l’argumentaire selon lequel:
– la décision du Conseil constitutionnel est un défi au droit et à la Cour de Justice de la CEDEAO, qui a ordonné à l’Etat burkinabè de lever tous les obstacles à la pleine participation de citoyens aux élections ;
– la décision du Conseil constitutionnel est un parjure du Chef de l’Etat qui a déclaré que le Burkina Faso se pliera aux injonctions de la Cour de la CEDEAO.
Désobéissance civile et boycott comme riposte
En riposte à cette «exclusion», ce groupe de partis sous la houlette de l’ex-parti au pouvoir, lance dans l’immédiat une campagne de désobéissance civile à travers tout le pays pour exiger la réintégration des «recalés» sur les listes de candidatures. De la forme de cette campagne de désobéissance civile, c’est le président du CDP, Eddie Komboïgo, qui explique, qu’«il ne s’agit pas d’inviter ses militants à casser ou bruler, mais à s’opposer de façon républicaine à cette décision inique». Aussi, pour la suite, c’est une menace de boycott qui est brandie, si toutefois cet appel ne bénéficiait pas d’un écho favorable auprès des autorités burkinabè.
Que peut-on attendre de la saisine de la CEDEAO?
S’appuyant sur le verdict prononcé par la Cour de justice de la CEDEAO en juillet dernier, les «mécontents» du mercredi 26 août, comptent saisir la conférence des chefs d’Etat de la CEDEAO afin qu’elle «contraigne» le Burkina Faso, pays membre de cette communauté, à se plier aux injonctions de cette juridiction supranationale dont l’immense majorité des membres éprouve du mal à montrer patte blanche. Sur ce point, l’on se demande vraiment ce que peut faire la CEDEAO face à cette décision irrévocable du Conseil constitutionnel.
Dans cet espace sous-régional, plusieurs décisions de cette Cour supra nationale ont déjà fait l’objet de rejet catégorique de la part des Etats membres. D’autres, par leurs caractères impopulaires, sont restées lettres mortes. L’un des exemples les plus emblématiques reste celui du Togo, interpellé à maintes reprises au sujet de l’affaire Pacha Gnassingbé mais qui rechigne à s’exécuter. A cela s’ajoute, l’appel incessant de cette même organisation dans la crise postélectorale ivoirienne de 2010. A aucun moment, les protagonistes n’ont prêté une oreille attentive aux appels de la CEDEAO. Ce sont les armes qui ont dû faire la décision entre les deux parties. Dans ce pays, et selon les chiffres d’Amnesty International, ce sont des centaines de pro-Gbagbo qui croupissent dans les geôles ivoiriennes, malgré les appels incessants des mouvements de défense des droits humains.
Au-delà, il y a l’affaire Karim Wade, dont la condamnation par la Cour de répression de l’enrichissement illicite vient d’être confirmée en dépit de la résolution prise par la Cour de justice de l’ONU, invitant le Sénégal à le libérer.
Par rapport à tous ces précédents, il n’est pas évident que le CDP et ses comparses aient gain de cause, en se remettant à la conférence des chefs d’Etat, dont la majeure partie traîne avec eux des injonctions de juridictions du même type. Comme l’ont précisé les «sages» du Conseil constitutionnel, le référentiel qui a conduit à l’invalidation de ces candidatures est le code électoral adopté en avril dernier par le CNT et qu’aucun «retoquage» n’a pas droit de citer.
A l’instar des opposants déboutés en 2005 par la même institution, au temps fort de la controverse sur la rétroactivité de la loi limitant les mandats présidentiels, le CDP ferait mieux d’emprunter la voie de la sagesse comme son alliée l’ADF/RDA parce que, c’était tout de même le parti qui, trois décennies durant, a présidé aux destinées du Pays des Hommes intègres.
W. DAVY