Les dirigeants qui ont soutenu la modification de l’article 37 peuvent-ils être finalement éligibles?

| 17.07.2015
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Les dirigeants qui ont soutenu la modification de l’article 37 peuvent-ils être finalement éligibles?
© DR / Autre Presse
Les dirigeants qui ont soutenu la modification de l’article 37 peuvent-ils être finalement éligibles?
Entre une décision de justice, à caractère sous-régional, et une disposition légale, également de portée sous-régionale, laquelle prime en cas de probable conflit, ne serait-ce que momentané? En attendant que d'autres éminents juristes contribuent à nous éclairer davantage sur cette question, si nous nous basons sur la lecture du Professeur Abdoulaye Soma, enseignant de droit constitutionnel à l'Université de Ouagadougou, l'on peut, a priori, en conclure que la première s'incline devant la deuxième. Auquel cas les militants du CDP et leurs alliés devraient bémoliser leur jubilation après la publication du verdict sur le nouveau code électoral rendu par la Cour de justice de la CEDEAO le 13 juillet dernier.


Bien que l'espoir soit encore permis de voir la situation se dénouer à leur faveur, surtout que certains praticiens du droit proches des autorités de la Transition ne disent rien qui puisse susciter le découragement de ceux qui ont soutenu ouvertement la modification de l'article 37. Répondant aux questions d'un journaliste de RFI, le président de la Société de droit constitutionnel a en effet laissé entendre qu'une disposition sous-régionale interdit la relecture de la loi électorale des pays membres à moins de six mois du scrutin. La présidentielle au Burkina étant prévue pour le 11 octobre prochain, il ne reste que 3 mois, donc un temps insuffisant pour procéder à une relecture du code électoral suivant l'arrêt de la Cour ouest-africaine.

C'est ainsi que, pour le Pr. Soma, pour mettre en application la décision, l'Etat burkinabè n'a d'autre choix que de s'en remettre au Conseil constitutionnel. La voie normative étant impossible, il reviendra au juge constitutionnel de passer par la pratique pour examiner les candidatures conformément à l'esprit de l'interprétation de la Cour de la CEDEAO. Et le conseiller spécial du Premier ministre Yacouba Isaac Zida de se contenter de donner un seul exemple, à savoir celui consistant à ouvrir la candidature aux élections à tout le monde sans autre exception que celles prévues avant l'adoption de la loi électorale du 7 avril 2015.
Me Hervé Kam, avocat de l'Etat burkinabè dans cette affaire l'ayant opposé au CDP et ses alliés, avaient pourtant émis la possibilité pour le Burkina de restreindre l'exclusion en la limitant aux seuls dirigeants, comme l'ont d'ailleurs suggéré les juges ayant connu du dossier. Est-ce par oubli, acte involontaire donc, que l'agrégé de droit constitutionnel n'a pas mentionné cette possibilité? Ou est-ce par omission, acte pouvant être volontaire alors, ce qui reviendrait à penser qu'il est convaincu, en tant que spécialiste du domaine, qu'une telle tentative ne saurait prospérer?

Quoi qu'il en soit, les responsables de l'ancien régime doivent se préparer à toute éventualité au lieu de crier un peu trop prématurément victoire. Interprétation pour interprétation, il n'est pas exclu que, même sans avoir eu la possibilité de disposer d'une loi relue, le juge constitutionnel burkinabè se fonde sur la possibilité de restriction affinée suggérée par le juge CEDEAO pour invalider toute candidature émanant d'un ancien dirigeant du régime Compaoré ayant participé au projet de tentative de révision de la Constitution. Tout comme le gouvernement pourrait prendre un décret d'application pour, comme l'a dit son porte-parole Frédéric Nikiéma, intégrer cette nécessaire restriction et en profiter pour clarifier la notion de dirigeants.

En tous les cas, faut-il le rappeler, loin d'être assimilable à une vengeance ou à une chasse aux sorcières, l'exclusion est nécessaire pour rétablir une certaine justice et décourager de tels forfaits anticonstitutionnels à l'avenir. Tous les moyens humains et légaux doivent donc y contribuer.

JPS

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