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Dr Lassina Zerbo: « Je n’ai jamais voté et cela me fait mal »

| 21.05.2015
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Dr Lassina Zerbo: « Je n’ai jamais voté et cela me fait mal »
© DR / Autre Presse
Dr Lassina Zerbo: « Je n’ai jamais voté et cela me fait mal »
Né en 1963 à Bobo-Dioulasso, Lassina Zerbo dirige aujourd'hui l'Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires (OTICE), une structure des Nations unies basée à Vienne en Autriche. Ancien étudiant en géologie de l'Université de Ouagadougou puis de géophysique en France, M. Zerbo imprime, depuis le 1er août 2013, sa marque à la tête de l'Organisation onusienne pour empêcher toute utilisation d'arme de destruction massive et pour la paix dans le monde. De passage à Ouagadougou, Dr Zerbo a, pendant près de deux heures d'horloge, répondu aux questions portant sur les essais nucléaires, l'actualité de son pays et du monde, avec parfois des larmes aux yeux...


C'était le vendredi 10 avril 2015.

Sidwaya (S.) : Qui est M. Lassina Zerbo ?

L.Z. : Je suis né à Bobo-Dioulasso, d'un père musulman croyant et d'une catholique pratiquante. J'ai passé toute mon enfance à Ouagadougou parce que ma mère, qui était infirmière, et mon père, qui travaillait à la Poste, y ont pris fonction en 1968 – j'avais trois ans à l'époque. Ainsi, j'ai fait mon parcours scolaire et universitaire à Ouagadougou avant d'aller étudier la géologie et la géophysique à Caen, en France. C'est au moment où je bouclais mon ingéniorat que j'ai été identifié et puis sélectionné pour travailler au Canada dans un domaine de pointe, à savoir les méthodes électromagnétiques aéroportées, avec l'inventeur du système-lui-même, le Professeur Peter Annan. C'était un projet financé par les Nations Unies qui voulaient réaliser une couverture aéroportée de la Boucle du Birimien aux fins de promouvoir les mines. C'était, à l'époque, une innovation majeure dans le secteur des mines. Cela m'amené à travailler avec les plus grands groupes multinationaux dans le domaine (comme BHP ou Anglo-American) à travers le monde et a contribué à asseoir ma renommée de scientifique doublé d'un manager. Au bout de 15 ans, j'ai estimé qu'il était temps de donner une nouvelle dimension à mon parcours professionnel. C'est ce qui m'a conduit, par un concours de circonstances que certains appelleraient le hasard aux Nations Unies. En effet, c'est en faisant des recherches sur l'Internet que je suis tombé sur la vacance du poste de Directeur du Centre international de Données (CID) de l'Organisation du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (OTICE). En lisant le descriptif du poste, j'avais l'impression que c'était moi qu'on décrivait. Naturellement, je me suis posé des questions sur l'opportunité et sur les chances qu'avait un jeune Burkinabé hors du Système onusien. Ceci me donne d'ailleurs l'occasion de dire qu'il est possible d'y arriver uniquement à force de travail, par ses compétences et en ayant la foi en bandoulière. Je me rappelle que lors de mon premier entretien, les membres du panel étaient surpris que ma candidature ne fût pas envoyée par le canal de mon Etat comme cela était le cas pour tous les autres candidats et se sont tout de suite demandé si je n'avais pas de démêlés d'ordre judiciaire ou politique dans mon pays. Naturellement, ils se sont rendu compte, après les enquêtes de rigueur, qu'il n'en était absolument rien. C'est dans ce contexte que j'ai été amené à faire la connaissance d'une personne remarquable, Madame Béatrice Damiba, qui était à l'époque Ambassadeur du Burkina Faso à Vienne. Passé le moment de surprise générée certainement par mon relatif jeune âge à l'époque, elle m'a toujours accordé son soutien total après ma prise de fonction comme Directeur du CID et nous avons eu à coopérer très étroitement. D'ailleurs, elle se plaisait à rappeler à ceux qui croyaient que j'étais Sud-Africain, à chaque fois que de besoin, que j'étais Burkinabé et fier de l'être.

Donc, c'est ainsi que je me suis retrouvé au poste de Directeur du CID, qui est l'une des divisions les plus importantes de l'OTICE, où pendant neuf ans j'ai travaillé avec mon prédécesseur au poste de Secrétaire exécutif, dans une ambiance formidable, à renforcer le Système de Vérification de l'OTICE et davantage gagner la confiance des Etats membres. Je me rappelle encore de ses mots à mon endroit lors de mon installation au poste de Secrétaire exécutif. Il a dit qu'il pensait avoir de l'énergie à revendre, mais il aurait rencontré, en moi, quelqu'un qui avait de la turbo énergie !

Si je dois tirer une leçon qui pourrait servir de viatique, je dirais qu'au-delà de la foi, il nous faut de l'amour, de la solidarité, de la générosité, de la loyauté et du dévouement aussi bien dans nos carrières professionnelles que dans nos vies privées. Je prends votre cas par exemple, si Sidwaya réussit dans sa mission, vous tous qui êtes avec lui vous réussissez puisque vous bénéficierez de cette réussite. Quand vous montrez que vous méritez de bénéficier d'une opportunité, d'autres opportunités vont s'offrir à vous. Il faut savoir faire don de soi ; c'est le secret de la réussite et c'est peut-être une chose qui a tendance à disparaitre en Afrique de nos jours. Je vais vous conter une petite anecdote. J'ai été, une fois, invité par l'Amicale des Femmes Ambassadeurs Représentantes auprès des Nations Unies a Vienne pour un petit déjeuner de travail. Il y avait 22 dames et j'étais le seul homme. Une des questions lors des débats fut la suivante : « C'est très beau ce que vous dites, mais quel est le secret de votre réussite ? » J'étais un peu perturbé et la réponse la plus spontanée qui me soit venue à l'esprit, c'était de dire que le secret de ma réussite c'était l'amour de mes parents. C'est peut-être également la réponse la plus sincère que je pouvais donner parce que mes parents ont toujours été là pour me porter de l'avant tout en m'inculquant des valeurs essentielles comme la tolérance, le respect, l'humilité. J'ai été béni d'avoir eu des personnes qui m'ont fait confiance. Ce qui m'a permis de me décupler, de redoubler d'efforts pour continuer à mériter leur confiance. A mon tour, j'essaie de faire de même avec mes enfants et avec toutes les personnes que je côtoie.

S. : Quelles sont les missions de l'Organisation que vous dirigez depuis le 1er août 2013 ?

Lassina Zerbo (L.Z.) : La Commission préparatoire de l'Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires (OTICE) est chargée de mettre en place le régime de vérification du traité d'interdiction dont l'objet est que nulle part sous les océans, nulle part sous terre, nulle part dans l'atmosphère, aucun pays, aucun groupe d'individus ne puisse effectuer une explosion nucléaire dans le but de développer l'arme atomique. La vérification du traité s'appuie sur un système de surveillance international composé de plus de 300 stations réparties sous les océans, sous terre et sur terre et basé sur 4 technologies de surveillance: la sismique pour la détection des évènements souterrains, l'hydro-accoustique, pour les évènements sous les océans, l'infrason pour les évènements dans l'atmosphère. Les stations radionucléides analysent en permanence l'air ambiant à la recherche de particules ou de gaz rares radioactifs dont la signature caractéristique fournirait la preuve aux états signataires de l'existence d'une explosion nucléaire annoncée ou dissimulée. Ce système de vérification a été établi de façon à couvrir entièrement la terre, les océans et l'atmosphère pour s'assurer qu'aucun essai nucléaire ayant pour objectif de contribuer au développement d'une arme de destruction massive ne passe inaperçu.

S. : Qu'est-ce qui est plus difficile dans vos missions ?

L.Z. : Je suis rentré à l'OTICE comme scientifique. Comme la science est exacte, je croyais que c'était facile, mais quand vous combinez la science à la diplomatie, il faut s'assurer que le politique s'accorde avec la science exacte que nous développons et s'assurer que nous vérifions le traité de manière exacte. Le plus difficile, c'est de convaincre les diplomates. Il faut savoir que le traité a fait l'objet de la plus longue négociation dans l'histoire du multilatéralisme. Il aura fallu plus de 40 ans d'efforts avant qu'il soit ouvert à la signature en 1996. A l'heure d'aujourd'hui 183 Etats l'ont déjà signé et 164 l'ont ratifié, pourtant, il n'est pas encore en vigueur. C'est pour cela que nous sommes encore une commission préparatoire mais cette appellation reflète mal la maturité opérationnelle de notre organisation. En attendant, notre rôle c'est d'allier la diplomatie à la science au service de la communauté internationale.

S. : Nous sommes dans un domaine purement technique, qu'est-ce qu'on peut entendre par essai nucléaire ?

L.Z. : Un essai nucléaire est une explosion, dans laquelle du matériel fissile est utilisé pour créer une réaction en chaîne qui va libérer une énergie importante et produire une détonation. Dans le cadre du développement d'une arme nucléaire les essais ont pour but de s'assurer qu'on peut faire une détonation avec le matériel fissile qu'on a assemblé, donc, avoir la chaîne de réactions nécessaire pour pouvoir créer une explosion. Si vous développez une arme et que vous ne la testez pas, vous ne pouvez pas savoir qu'elle fonctionne. Il faut faire une série de tests pour savoir que votre développement fonctionne. C'est comme dans toute science, on a besoin d'expériences pour pouvoir, même si on fait des calculs théoriques basés sur des modèles, arriver à la réalité et à la pratique. C'est pour cela que notre rôle est de s'assurer que personne ne puisse faire ce type d'essai pour dissuader ou stopper toute entreprise, dont le but serait d'atteindre l'arme de destruction massive. Vous entendez parler de l'Iran, d'enrichissement. Vous pouvez enrichir l'uranium à des fins pacifiques pour produire de l'électricité et utiliser l'énergie. Mais l'enrichissement de l'uranium ne vous conduit pas directement à l'arme nucléaire. Il vous donne tous les éléments qui peuvent vous servir à créer la chaîne de réactions pour la détonation et quand vous voulez mettre en œuvre cette chaîne de réactions , vous êtes obligés de faire des essais, et ce sont ces essais-là que nous bloquons.

S. : Est-ce qu'on peut concrètement interdire ces essais nucléaires?

L.Z. : Même si le traité n'est pas encore en vigueur, depuis 1996 les essais sont de facto déjà interdits. Au 21e siècle, à l'exception de la Corée du Nord, aucun autre Etat ne s'est autorisé à faire des essais nucléaires. L'Inde et le Pakistan ont effectué des essais en 1998 durant leur guerre froide. Tous les autres essais ont eu lieu avant l'ouverture à la signature du traité. La France a fait ses derniers essais nucléaires avant de passer à la signature et à la ratification de ce traité. Je peux vous dire aujourd'hui que l'on peut interdire totalement les essais nucléaires parce que nous disposons d'un système de vérification dissuasif qui ne permet pas de dissimuler un essai.

S. : Depuis votre prise de service, qu'avez-vous obtenu comme résultats?

L.Z. : Depuis ma prise de fonction, la passion et les progrès accomplis sont ma source de motivation. On ne fait jamais rien tout seul. Il faut donc avoir la passion mais aussi amener les gens à partager cette passion. C'est ce qui m'a amené à créer le groupe des personnes éminentes. Il est composé d'anciens Premiers ministres, de ministres des Affaires étrangères et de hautes personnalités. L'actuelle haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, fait partie de ce groupe. J'ai «coopté» l'ancien Premier ministre australien Kevin Rudd, l'ancien ministre russe des Affaires étrangères, Igor Ivanov, il y a deux anciens ministres britanniques de la Défense. J'ai un certain nombre de personnalités dont deux anciens sous-secrétaires des Nations unies pour le désarmement, un Brésilien et un Japonais. J'ai créé un groupe d'une vingtaine de personnes qui travaille avec moi pour sensibiliser et s'occuper de ces 8 pays restants dont la ratification est nécessaire pour l'entrée en vigueur de ce traité. Pourquoi ? Mes fonctions de secrétaire exécutif ne me laissent pas suffisamment d'espace ni de temps pour me consacrer uniquement à cette tâche. Je veux tout simplement démultiplier mes efforts et mettre l'expérience de ces personnes éminentes à contribution pour m'aider à avancer, pour m'aider à obtenir l'entrée en vigueur de ce traité ; c'est ce qui est important. Même si des anciens ministres ou diplomates ne sont pas en fonction aujourd'hui, de par leurs relations, leur expérience des affaires internationales et de domaines pointus qui ont trait aux affaires de sécurité de désarmement et de non-prolifération, leur collaboration permanente est une contribution essentielle pour la promotion de l'entrée en vigueur du traité.

S. : Quels en sont les enjeux géopolitiques et stratégiques?

L.Z. : Ce traité existe pour faire face à ces enjeux politiques et stratégiques. Vous savez aujourd'hui, si on prend les zones de tension, au Moyen-Orient par exemple, vous avez l'Egypte, l'Iran et Israël qui n'ont pas ratifié le traité. Il y a aussi l'Inde et le Pakistan. Le Pakistan ne signera probablement pas le traité tant que l'Inde ne le fera pas et vice versa. L'Inde a fait des essais, le Pakistan a alors tout fait pour développer l'arme nucléaire. L'Inde a fait des essais pour prouver qu'elle avait l'arme nucléaire et le Pakistan a répliqué en faisant de même. L'Inde fait des ogives à portée de 2500 km et cela couvre la péninsule indienne jusqu'au Pakistan. Les gens se demandent aujourd'hui pourquoi l'Inde veut aller jusqu'à 5000 km, 10000 km? En supposant qu'aujourd'hui, sur l'échiquier géopolitique, l'adversaire de l'Inde n'est plus le Pakistan mais la Chine, dans le cadre de la construction d'une dissuasion nucléaire l'Inde sera tentée de montrer qu'elle a des ogives nucléaires qui peuvent atteindre ses adversaires potentiels. Voilà un foyer de tension qu'il faut gérer parce que ce que l'on veut, c'est créer un monde meilleur pour nos enfants. Et le monde meilleur pour nos enfants, c'est de s'assurer que les gens n'ont pas dans leurs mains, les armes de destruction. Il faut visiter Hiroshima pour comprendre ce que l'arme nucléaire peut faire. On n'a pas besoin d'être à Ouagadougou pour détruire Ouagadougou. On peut rester à Hollywood et envoyer une arme nucléaire à Ouagadougou. C'est ça le danger. Quand ça se produit, ça ne tue pas une partie, ça brûle et détruit tout sur son passage. Mais est-ce qu'on a besoin de cela ? Prenons la péninsule coréenne, la Corée du Sud et la Corée du Nord, elles sont séparées depuis 55 ans, ce sont des frères qui se sont battus et qui ne sont plus ensemble. Développer l'arme nucléaire nécessite des moyens financiers colossaux. Comment peut-on comprendre qu'au 21e siècle, dans un pays où les gens ont faim, autant de moyens soient consacrés au développement d'armes de destruction massive aussi puissantes et aussi destructives. La Corée du Nord peut le faire aujourd'hui, parce qu'elle estime qu'elle est tellement isolée par la communauté internationale qu'elle se doit en priorité de dissuader toute attaque potentielle. Elle en fait donc une question de survie. Pour ma part, je trouve le monde trop civilisé pour que l'on puisse s'octroyer des armes de destruction massive comme seul gage de sûreté ou de survie. Et ça, c'est ma conviction personnelle. Je pense que nous devons dialoguer, travailler ensemble. J'expliquais à des étudiants que quand j'étais à l'école primaire, si tu faisais une bêtise, ceux qui étaient plus forts te disaient qu'ils t'attendaient à 17 h pour te taper. Aujourd'hui, cela ne se fait plus, ils t'envoient maintenant un sms pour te menacer. Il y a moins de bagarre physique. Cela veut dire qu'on évolue et le monde évolue de la même manière. Pour moi, les armes de destruction massive sont d'une autre époque. Nous sommes maintenant dans une époque où nous devons dialoguer, mais dialoguer pour désarmer. Mais pour désarmer, il faut d'abord arrêter la prolifération. Il ne faut pas tout de suite s'arc-bouter sur des questions de discrimination et dire que seulement 5 pays ont officiellement le droit de posséder des armes nucléaires, alors pourquoi pas nous ? Il est essentiel d'arrêter la prolifération pour créer les conditions pour un désarmement effectif.

S. : Le fait que les Etats-Unis, la première puissance, ne ratifient pas ce traité, est-ce un aveu d'échec ou plutôt une source de motivation pour les convaincre dans le cas du dialogue que vous évoquez?

L.Z. : Une toute petite précision, les Etats-Unis ont signé le traité. Le président Clinton est le premier chef d'Etat au monde à avoir signé le traité et le président Obama en a fait sa priorité quand il a pris fonction. Il est à la fin de son mandat et nous sommes en démocratie. Dans beaucoup de pays, les ratifications passent par le parlement. Dans d'autres, le président peut faire ratifier un traité. Aux Etats-Unis, Obama n'a pas la majorité au Congrès. Il y a des questions internes et domestiques qui vont au-delà de ce que nous faisons. Aujourd'hui, tout succès d'Obama sera mal vu par l'autre camp. Tout ce qu'il pourra présenter aujourd'hui n'entrera pas dans la faveur de l'autre camp, les Républicains, qui sont majoritaires. C'est ça qui fait que ce n'est pas seulement le traité d'interdiction des essais nucléaires, mais tout traité aujourd'hui aux Etats-Unis qui ne passera pas au Congrès. Savez-vous que pour la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, on a montré à la télévision un handicapé qui a voté contre sa ratification. Cela veut tout simplement dire qu'il se trouve dans un camp qui ne veut pas donner le succès à l'autre camp. Pourtant, ce traité, c'est pour lui. On fait un traité pour aider les handicapés, il y a des handicapés qui refusent de voter pour ce qui va les aider! C'est pour vous donner une idée du contexte dans lequel nous sommes. Ce n'est pas que les Etats-Unis ne croient pas à notre traité, d'ailleurs, ils sont les plus gros contributeurs de notre organisation. J'ai visité les Etats-Unis au moins deux ou trois fois par an, plus que n'importe quel pays depuis que j'ai pris fonction et depuis avoir rejoint l'organisation il y a 11 ans. Ce n'est pas parce que le traité n'est pas ratifié par les Etats-Unis qu'ils ne contribuent pas. Ils participent activement, ils financent à hauteur de 20% du budget de l'organisation. L'échelle des contributions est répartie comme dans le système des Nations unies. Ce n'est pas parce que le traité n'est pas encore ratifié que le président n'en fait pas sa priorité. Aujourd'hui, la question n'est pas de croire au système de vérification que nous avons mis en place. Les seuls freins aux Etats-Unis restent des questions de politique intérieure sur lesquelles nous n'avons que peu d'influence.

S. : Il y a d'autres pays du Moyen-Orient qui refusent de renoncer à l'arme nucléaire.

L.Z. : J'étais en Israël, il y a un an. En 2014, j'ai rencontré les ministres israéliens des Affaires étrangères et du Renseignement. Au cours de ma visite, ils m'ont évoqué deux points d'achoppement par rapport à ce traité. Le premier est la couverture globale de notre système de vérification, pour s'assurer que quand quelque chose se passe en Egypte par exemple, on n'accuse pas les Israéliens et quand quelque chose se passe en Israël, on n'accuse pas les Egyptiens, les Syriens, les Libanais... Nous répondons à cette question par l'efficacité de notre système de vérification. Et quand je parle d'efficacité, permettez-moi d'ouvrir la parenthèse en disant que l'explosion qui s'est produite à Larlé (Ndlr : l'explosion a eu lieu le mardi 15 juillet 2014 au quartier Larlé de Ouagadougou), nous l'avons détectée avec une station qui se trouve à Dimbokro, en Côte d'Ivoire qui est à 960 km à vol d'oiseau. Toute explosion qui libère une demi-kilotonne d'équivalent TNT ou parfois moins nous la détectons. Le crash de l'avion d'Air Algérie (le 24 juillet 2014) à la frontière du Burkina et du Mali a été détecté par nos services. Cela n'est pas notre mission première et nous ne faisons pas de communication ou de publicité là-dessus tant que les gens ne nous demandent pas les informations. En parlant de l'efficacité du système, il s'agit ici de montrer comment notre système est sensible aujourd'hui et comment nous couvrons le globe, les océans et l'atmosphère, pour s'assurer qu'on peut identifier avec précision la localisation et les caractéristiques des évènements.

Le 2e point, c'est l'isolement ; ils se sentent isolés. Mais pour ne pas se sentir isolés, il faut dialoguer, parce que ce sont les mêmes problèmes que les Egyptiens vont évoquer lorsqu' ils veulent qu'ils renoncent à l'arme nucléaire. Officiellement, Israël n'est pas un pays doté de l'arme nucléaire. Officiellement, dans le cadre du traité de non-prolifération nucléaire, il y a cinq pays qui disposent de l'arme nucléaire : la France, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, la Chine et la Russie. Tous les autres pays qui ont développé ou possèderaient l'arme nucléaire sont hors de ce cadre. En incluant les pays dotés, nous arrivons à un total de 9 pays. Comme je le disais précédemment, il vaut mieux se concentrer sur 9 pays et essayer de les amener à désarmer que de justifier, pour raisons discriminatoires, la prolifération nucléaire et d'en avoir 50 qu'on n'arrive pas à désarmer. On doit éviter de prendre le caractère discriminatoire entre Etats dotés et les autres comme cheval de bataille pour combattre ou contrecarrer les traités de non-prolifération et le traité d'interdiction des essais, et tous les traités multilatéraux qui veulent nous amener vers la paix. Pour revenir à la question, c'est vrai, il faut qu'on amène Israël à discuter et à savoir que leur accession à certains cadres multilatéraux et internationaux passe par leur adhésion à certains traités dont le traité d'interdiction complète des essais nucléaires. C'est ce que je m'efforce à leur dire.

S. : Est-ce que vous êtes écouté ?

L.Z. : Je pense que je suis plus écouté parce que je viens d'un pays qui n'a pas d'intérêt particulier. Je suis d'une neutralité beaucoup plus exemplaire. C'est une question qui m'a déjà été posée quand j'ai reçu 12 journalistes pakistanais. La plus jeune m'a dit : "Monsieur Zerbo, est-ce que je peux vous parler ? Ce que je vais vous dire va être choquant, mais la fin sera aimable. Quand on venait et qu'on nous a dit que vous êtes Burkinabè, un Africain qui dirige l'organisation, on s'est dit que c'était des nuages. On met un Noir, un Africain, un petit pays pour faire bien. Mais après avoir passé deux heures de discussions avec vous, nous sommes ressortis fiers. Nous sommes fiers parce que nous sentons que vous maîtrisez votre domaine". C'est ce message que nous devons mettre en avant. Faut-il que les Africains ou les Burkinabè, nous nous concentrions seulement sur l'élevage ou l'agriculture ? Ce n'est pas seulement ça. Le monde est beaucoup plus global, le monde est beaucoup plus moderne aujourd'hui. Ce que je veux, c'est que plus de Burkinabè, plus d'Africains touchent à ces questions sensibles pour que le monde sache, que quand il y a sur une table de discussions les questions sensibles de ce monde, qu'on trouve aussi des Africains. Ce n'est pas parce que ce sont des gens de petits pays ; ils ont aussi leur mot à dire. C'est ce message que je veux faire passer. Si j'avais le sentiment que je suis là-bas parce que je suis Noir ou Africain, je peux vous dire que je pleurerais tous les jours. Je vous assure que j'ai été élu avec 34 pays africains qui n'avaient pas droit au vote, parce qu'ils n'étaient pas à jour de leur cotisation. Cela veut dire que je n'ai pas été élu par les Africains, mais par la communauté internationale et ça, c'est quelque chose qui montre qu'elle a tout simplement besoin de talents et d'expertise, quelles que soient leurs origines. Et quand vous venez d'un petit pays et que vous montrez que vous maîtrisez votre sujet, on vous ouvre des portes et on vous donne des opportunités. Ce que je souhaite à tout un chacun, à vous tous, que vous puissiez avoir le potentiel et l'opportunité de montrer à tous votre potentiel pour qu'on vous ouvre d'autres portes parce que le monde est global aujourd'hui. J'aimerais un jour si je suis interviewé sur CNN, que ça soit un des desks politiques (de Sidwaya) qui m'interviewe.

S. : Depuis plusieurs années, l'Iran tente de se doter de l'arme nucléaire. Comment avez-vous suivi les négociations sur le nucléaire iranien censées aboutir à un accord avec les puissances occidentales ?

L. Z. : Tout d'abord, il faut vous dire que l'Iran est un pays signataire du traité d'interdiction des essais nucléaires et que nous coopérons avec les Iraniens de façon régulière. Ils participent à nos travaux techniques, à notre cadre budgétaire et à notre cadre politique. L'Iran n'a pas ratifié le traité pour des questions personnelles. On a amené l'Iran à réduire le nombre de centrifugeuses. Moi, si je suis Iranien et si je veux montrer patte blanche, je ratifie le traité d'interdiction complète des essais nucléaires parce que si les gens me demandent pourquoi j'enrichis, je réponds que je m'interdis de faire des essais qui puissent m'amener à monter l'arme nucléaire. Ça vous met dans une position de force pour traiter des questions d'enrichissement et amener les gens à se focaliser sur l'aspect pacifique de l'utilisation de l'énergie nucléaire. A ce niveau, le problème a été traité en amont alors qu'en aval, on aurait pu traiter une question simple en amenant l'Iran à ratifier le traité d'interdiction complète des essais nucléaires sachant qu'un essai nucléaire est l'élément décisif dans le développement d'une arme. Cela aurait mis l'Iran dans une position de discussion et amené la communauté internationale à se poser des questions. Mais cela n'a pas été l'approche retenue, ils sont allés sur l'enrichissement et je me satisfais aujourd'hui qu'il y ait eu un accord-cadre qui va aboutir à un accord, au mois de juin. J'espère maintenant que cet accord rendra obsolète la non-ratification de l'Iran parce que si vous avez un accord qui prouve que vous n'allez pas développer l'arme nucléaire, il va de soi que votre ratification du traité d'interdiction complète des essais nucléaires est évidente. Et c'est ce message que je veux porter.

S. : En l'état, le pré-accord vous satisfait-il ?

L.Z. : Je ne suis pas rentré dans les détails du pré-accord. L'accord-cadre dit que les Iraniens sont satisfaits et que ceux qui ne veulent pas que l'Iran développe l'arme nucléaire sont satisfaits. C'est dire que l'Iran n'a pas de marge de manœuvre pour développer l'arme nucléaire. En tant que Secrétaire exécutif d'une organisation qui interdit les essais nucléaires, je me satisfais de cet accord parce qu'il va amener un pays de l'annexe II du traité à ratifier et à créer les conditions de ratification des autres.

S. : A vous écouter, il y a un peu d'inquiétudes. Vous reconnaissez que ce sont des gens qui se sentent isolés et l'arme nucléaire semble être leur argument. Sans résoudre ce problème d'isolement, comment allez-vous parvenir à la mise en œuvre de cet accord ?

L. Z. : Il y a 183 pays qui ont signé ce traité. Cela veut dire qu'il y a 92% du monde qui dit non aux essais nucléaires. Pourquoi devons-nous nous laisser prendre en otage par 8 pays qui stoppent l'entrée en vigueur d'un traité que nous savons nécessaire pour créer les conditions de paix et de sécurité mondiale ? C'est là, la question. On parle d'isolement, moi, j'ai parlé d'époque. Cet isolement, on peut le voir à une époque où la force était la seule manière d'avancer.

S. : C'était au temps de la guerre froide ?

L. Z. : La guerre froide, j'en viens. Je vous ai montré ce matin un article dans un magazine intitulé «Poutine ou la bombe ?». Cette question m'a été posée : Est-ce que la Russie ne va pas recommencer à faire des essais nucléaires ou essayer d'améliorer les performances de leurs ogives nucléaires ? J'ai répondu non parce que j'ai posé la même question au ministre Lavrov au cours d'un entretien que nous avons eu récemment et qu'il m'a lui-même répondu non. Je ne peux que le croire car il est le ministre des Affaires étrangères d'un pays qui a signé et ratifié le traité et qu'il s'adressait à la personne qui dirige l'organisation en charge de mettre en œuvre ce traité.

S. : Avez-vous confiance aux autorités russes ?

L. Z. : Je fais confiance aux autorités russes parce que jusqu'à présent, elles ont apporté tout leur soutien à la mise en œuvre de ce traité et à ce que je leur ai demandé dans le cadre de l'établissement et de l'exploitation du système de vérification, et je ne peux que leur faire confiance tout comme je fais confiance aux 183 pays qui ont signé le traité.

S. : Et au cas où vous enregistrez une explosion d'origine nucléaire, quelle sera la suite ?

L. Z. : Je préférerais être dans une situation aujourd'hui où le traité est en vigueur, où si quelqu'un tente de dissimuler une explosion nucléaire nous puissions, avec l'accord du conseil exécutif, déclencher une inspection sur place sur le territoire où l'événement a été détecté et prouver efficacement qu'un essai nucléaire a été effectué. Le traité n'est pas en vigueur, pourquoi ? Posons-nous la question. La réalité est que beaucoup de pays ont des réticences sur le fait qu'une organisation puisse jouer le rôle de gendarme du monde. On revient sur votre question sur la géopolitique. Le multilatéral a un peu de difficulté parce certains se disent pourquoi donner à une institution tout le pouvoir de décider, tout le pouvoir de dire c'est "A" qui a fait ça, c'est "B" qui n'a pas fait ça et nous voulons qu'on tape sur "C". Voilà un peu ce qui retarde ces traités multilatéraux aussi sensibles que le traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Est-ce que vous savez qu'un pays doté de l'arme atomique ne peut diriger une organisation sensible comme la nôtre ? La Commission de l'organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires ne peut pas être dirigée par un Américain par exemple. Pourquoi ? Parce qu'on ne veut pas permettre aux Etats-Unis d'être juges et arbitres. Puisque les Etats-Unis font partie des 5 pays dotés, on ne peut pas les laisser diriger une organisation qui leur interdit et qui a pour vocation à stopper la prolifération et aller vers le désarmement.

S. : Vous avez récemment déclaré que la prolifération nucléaire menace la sécurité mondiale et entrave la coopération dans le domaine du nucléaire civil en sapant la confiance. Est-ce un aveu d'impuissance ? Comment votre organisation travaille justement à surmonter ces obstacles et partant, à promouvoir le désarmement nucléaire ?

L. Z. : Dans cette organisation et dans tout ce que je fais, je n'oublie jamais que je viens d'un pays en voie de développement et garde en permanence cette perspective à l'esprit, car il ne faut jamais oublier d'où l'on vient. Ce que je demande aux Européens, c'est de ne pas être assis à discuter d'un traité ou de la non-prolifération pour donner l'impression aux autres, qu'ils ont quelque chose qu'ils ne veulent pas que d'autres possèdent aussi. Moi, ce n'est pas ma perception du rôle que je joue actuellement. Je veux que tout le monde ait droit au nucléaire civil. Mais le nucléaire civil, on y a droit dans un cadre de sécurité et de garanties dans la discipline. Vous avez le Nigeria qui veut avoir le nucléaire civil. Mais si le nucléaire est dans la zone du Delta et que Boko Haram attaque une centrale nucléaire, vous voyez le dommage que cela va créer en Afrique de l'Ouest ? Donc, il faut s'assurer des conditions de sécurité, de garanties pour d'abord être en état de bénéficier du nucléaire civil qui a ses dangers. Vous avez vu l'accident de Fukushima. Créons donc les conditions de garanties pour éviter que cela n'affecte pas l'environnement, mais aussi pour ne pas permettre un détournement vers le nucléaire militaire. Je suis pour le nucléaire civil dont l'Agence internationale de l'énergie atomique s'occupe. Elle est tenue de s'assurer qu'on utilise le nucléaire pour le civil et nous, on s'occupe de s'assurer que personne n'ira au bout d'un programme militaire.

S. : Pouvez-vous nous éclairer d'avantage sur ces deux notions : le nucléaire civil et le nucléaire militaire ?

L.Z. : Vous voyez qu'il y a des coupures d'électricité en ce moment (Ndlr : au Burkina Faso). Ces coupures s'expliquent parce que la demande est plus forte que l'offre. Cela veut dire que la population a évolué. Et que faire pour satisfaire tout le monde ? Il faut aller vers le nucléaire civil. J'espère qu'un jour, le Burkina Faso sera dans des conditions de sécurité et de garantie pour avoir l'énergie nucléaire : le nucléaire civil. Les Argentins sont en train de développer l'énergie nucléaire à faible coût pour les pays en voie de développement. J'ai visité cet institut du nom d'INVAP. Ils ont développé une petite centrale nucléaire à moyen coût qui va être commercialisable dans 4 ans. Ce sont des centrales qui pourront être utilisées par le Burkina Faso. Le nucléaire civil est important et nous en avons besoin. Tout pays a droit au nucléaire civil comme l'atteste le traité de non-prolifération. C'est le pas vers le nucléaire militaire qui pose problème. Pourquoi ? Parce que quand vous avez le nucléaire civil et vous faites de l'enrichissement pour l'électricité, il y a des taux qui prêtent à confusion. Si c'est de l'enrichissement pour l'électricité, on ne doit pas excéder 20% comme taux. En allant au-delà, ils peuvent être tentés de développer l'arme nucléaire. C'est la question qui se pose en Iran qui a signé le traité de non-prolifération et a droit au nucléaire civil tout comme le Burkina Faso et d'autres pays qui ont signé cette convention.

S. : Un pays comme le Burkina Faso peut-il se doter d'une centrale nucléaire ?

L. Z. : Comme tous les pays, il y a droit. Tous les pays peuvent l'avoir à condition que le pays s'arroge des conditions de sécurité et de garantie qui permettent l'utilisation et l'exploitation de l'énergie nucléaire à des fins civiles. Nous avons une autorité nationale à l'énergie atomique, un centre de régulation de l'énergie atomique. Il faut que nous créions d'abord les conditions de contrôle de matériels radioactifs qui passent par le Burkina Faso. Je crois que l'autorité de régulation s'occupe de cela. Si on crée ces conditions et qu'on a le financement, le Burkina Faso peut se doter d'une petite centrale nucléaire.

S. : Comment expliquez-vous que la Conférence du désarmement soit plongée dans une léthargie alors qu'elle est censée être le point de départ de négociation d'un traité interdisant la production de matières fissiles, cette première matière des armes, pour les armes nucléaires ?

L. Z. : Les gens disent que la Conférence du désarmement basée à Genève est dans une sorte de léthargie parce qu'on n'a pas avancé sur les questions sensibles pendant longtemps. Pourquoi ? Parce que le traité d'interdiction a 20 ans. On aura 20 ans en 2016. Il n'est pas admissible qu'un traité mette 20 ans pour son entrée en vigueur. Savez-vous que ce traité quand il a été signé par le président américain, Bill Clinton en 1996, il espérait qu'en 1999 toutes les signatures seraient acquises et que les 44 pays de l'annexe II l'auraient ratifié afin qu'il entre en vigueur. Nous sommes une organisation qui fonctionne, mais qui attend le cadre juridique pour permettre aux Etats de jouir de ce qu'ils ont mis en place. On a dépensé plusieurs milliards d'euros pour construire ce système de vérification sophistiqué. J'ai eu le plaisir et l'honneur de la visite du président de la Commission de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo, il y a trois semaines (l'interview a eu lieu le 10 avril 2015). Il était impressionné. Quand le président Obasandjo est venu, je l'ai fait visiter une des stations radionucléides qui est installée sur le toit de l'organisation. Cette station aspire et analyse l'air ambiant et 27 ans après l'explosion de Tchernobyl, elle enregistre encore des traces de cet évènement. Cela vous donne une idée de la sensibilité de nos appareils. Un autre exemple, savez-vous que quand il y a eu l'essai nucléaire en Corée du Nord, on l'a détecté ? Comment cela se passe-t-il ? Nos appareils détectent l'évènement par la sismique ou l'infrason. Toute explosion détectée ne veut pas dire qu'elle est nucléaire. Qu'est-ce qui vous donne le caractère nucléaire ? Il faut détecter les isotopes radioactifs qui sont dégagés par cette explosion, mais si l'explosion est enfouie 2000 mètres sous terre, il faut s'assurer que nos stations puissent détecter les gaz qui vont s'échapper par les craquelures du sol. En 2006, 12 jours après, c'est notre station au Canada à plus de 7000 km qui a détecté l'isotope radioactif. La modélisation de transport atmosphérique nous a permis d'annoncer à nos Etats que ce que nous avions détecté au Canada pouvait être corrélé à ce qui s'est passé en Corée du Nord. La combinaison de ces informations issues de plusieurs technologies indique le caractère nucléaire de l'évènement. Voilà comment on procède pour dire à nos Etats qu'on a affaire à un essai nucléaire.

S. : Parlant de la Corée du Nord, admettons que ce pays veuille faire des essais nucléaires ; quels sont les moyens que votre organisation utilisera pour l'en dissuader ? Puisque vous semblez dire que c'est un pays difficile.

L. Z. : La meilleure manière est qu'il aurait fallu que ce traité soit en vigueur aujourd'hui. Mais vous savez comment est la nature humaine ? La nature humaine est telle que nous attendons des crises pour réagir. Regardez toutes les grandes questions, toutes les solutions de ce monde sont passées par des crises. Regardez ce qui s'est passé en Syrie, la communauté internationale a attendu qu'on ait les preuves de l'utilisation de l'arme chimique pour amener Bashar Al-Assad à signer la convention sur les armes chimiques et à créer les conditions du démantèlement de son arsenal chimique. Est-ce que vous voulez une détonation nucléaire à des fins militaires pour que ce traité entre en vigueur ? C'est cette question que je pose à la communauté internationale.

S. : Justement, quelle serait votre réponse si on vous pose la même question ?

L. Z. : Je dis non. Non, parce qu'il faut changer la nature humaine aujourd'hui pour prévenir plutôt que guérir. Parce que si nous attendons une détonation nucléaire pour réagir sur ce traité, ça veut dire que nous n'avons pas pris conscience que dans ce 21ème siècle, nous sommes dans un monde civilisé. Et ça, c'est un problème ! Dommage, la nature humaine est ainsi mais c'est à nous, à vous les médias, à votre génération de faire passer l'information de sorte que les gens sachent qu'il n'y a plus de place pour ce type de barbarie. C'est de la barbarie que d'utiliser l'arme nucléaire, chimique ou biologique aujourd'hui. Ceci m'amène sur une autre question. Les gens me disent souvent : vous parlez d'armes nucléaires, nous, nous avons des armes légères telles que les kalachnikovs qui nous posent plus de problèmes et qui tuent plus de personnes. Je leur dis que les kalachnikovs sont des armes de destruction massive parce que ça tue et même plus que l'arme nucléaire qu'on n'utilise plus aujourd'hui (on espère, touchons du bois). Ça m'amène à quoi ? A dire que les questions sensibles de ce monde doivent être traitées de façon intégrée et c'est ça le plus grand défi. Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui, on parle de sécurité nucléaire, on a peur que le matériel fissile ne tombe dans les mains des terroristes comme l'Etat islamique, Boko Haram, les Shebab. Pendant qu'on n'a pas mis encore en vigueur le traité d'interdiction complète des essais nucléaires, pendant qu'on n'a pas traité les problèmes de la Conférence du désarmement dont vous parlez, pendant qu'on n'a pas réglé les problèmes du traité de non-prolifération, on statue sur un autre problème qui est la sécurité nucléaire parce que c'est une question d'actualité. Vous savez, je n'ai pas encore vu ça au Burkina Faso, mais dans certains pays quand on m'interviewe, on me demande qu'est-ce qu'il y a de croustillant ? Ce qu'il y a de croustillant, c'est quand il y a une détonation nucléaire, là, tous les journalistes accourent pour me voir le lendemain parce qu'ils veulent savoir ce qui se passe. C'est ça le problème. Je crois qu'il y va de votre responsabilité (Ndlr : il parle des journalistes) parce que c'est vous qui vous focalisez sur les crises. C'est cela, en fait, l'un des défis majeurs que nous avons aujourd'hui. Nous avons besoin d'évènements pour pouvoir vendre les journaux, pour que la télé marche. Certes, le monde a changé et nous devons nous y adapter. Mais il faut qu'on s'assure de ne pas oublier les questions sensibles de ce monde. Et moi, je pense que toutes les questions d'armes chimiques, biologiques, nucléaires et de sécurité nucléaire doivent être gérées de façon intégrale. Parce que quand vous allez à Bobo-Dioulasso ou à Niamey, quand vous dites armes de destruction massive, ils mettent tout dans le même sac. Ils ne font pas la différence entre l'arme biologique et l'arme chimique et c'est le message que je porte aux Occidentaux. Je leur dis d'essayer d'éviter d'être dans une situation où ils font croire qu'aujourd'hui nous nous focalisons sur la sécurité nucléaire. Essayons de résoudre tous les problèmes de façon intégrée. Cela permettra d'avoir la coopération et l'adhésion des pays en voie de développement. Et on ne peut pas résoudre ces questions sans les pays en voie de développement.

S. : Revenons sur les enjeux du nucléaire militaire. Est-ce qu'il est possible d'amener les grandes puissances qui disposent déjà de la bombe atomique à s'en séparer ?

L. Z. : Toute la littérature que vous voyez à ce sujet, les gens disent que c'est possible, mais pas de leur vivant. Mais quand les gens me disent ça, je réponds que j'espère que leur vie n'est pas assez courte. Parce que je suis optimiste. Pourquoi ? Il y a deux ans, est-ce qu'on vous aurait dit que la Syrie allait démanteler son arsenal chimique. Personne ne pouvait parier sur cela. Mais la Syrie l'a fait, mais après une crise. Moi, ce que je dis, c'est que la Syrie l'a fait pour que ça soit une leçon pour la communauté internationale. Mais la communauté internationale, ce n'est pas les autres, c'est vous. Quand vous écrivez sur le désarmement, la non-prolifération, ça va faire échos aux Etats-Unis. Ça permet aux Américains de s'intéresser à ces questions et de vous inviter. Malheureusement, vous ne le faites pas assez. Moi, je ne peux pas amener tout seul ces pays à abandonner l'arme nucléaire, vous pouvez m'aider à les amener à prendre ces questions beaucoup plus au sérieux qu'ils ne le font. Je veux bien le faire et je le fais, mais j'ai besoin de l'accompagnement des médias. Parce que les médias, c'est une autre arme nucléaire aussi.

S. : Mais est-ce que combattre le nucléaire, ce n'est pas aller à l'encontre de la science quand on sait que ce sont des savants qui s'y sont investis pour offrir au monde une telle technologie ?

L. Z. : Tapez sur Google Richard Dick Garvin. Il a 86-87 ans aujourd'hui. C'est lui qui a mis au point la bombe à hydrogène. Il dit qu'il a contribué à développer l'arme nucléaire, mais il la combat aujourd'hui parce qu'il se demande pourquoi il l'a fait. Mais il l'a fait à une époque sans savoir la portée que ça pouvait avoir. Lui, il était focalisé sur l'élément fissile, la fission et la détonation. Il voulait juste voir ce que ça donne. Il l'a créé mais il s'est rendu compte que ça pouvait être utilisé à des fins de destruction. Mais voyons le côté positif, utilisons cela à des fins pacifiques parce que cette fission peut créer de l'énergie que nous pouvons utiliser de façon propre. Voilà deux aspects qu'il faut essayer de corréler de manière à éviter d'aller vers la destruction parce que nous allons vers la civilisation. Et c'est lui d'ailleurs qui m'a dit ça que je paraphrase : « Dr Zerbo, ne vous en faites pas, je pense que le monde aujourd'hui est trop civilisé pour que des gens s'adonnent à des essais nucléaires».

S. : Parlons de l'Afrique, quel rôle ce continent, a priori non producteur d'armes nucléaires mais potentiel client, peut jouer dans la lutte contre la prolifération des armes nucléaires ?

L. Z. : Le Traité de Pelindaba, qui fait de l'Afrique une Zone exempte d'armes nucléaires, constitue un engagement sans équivoque du Continent pour la non-prolifération et le désarmement nucléaires. Ce Traité est partie intégrante d'une approche plus globale qui est la mise ne œuvre de la Politique africaine commune de défense et de sécurité qui elle-même une composante clé de l'architecture de l'Union Africaine. Donc, à ce niveau-là, les pays africains ont dans leur quasi-totalité compris les enjeux. Evidemment, tous les pays n'ont pas encore ratifié le Traité de Pelindaba – certainement pour des raisons diverses et non liées au Traité lui-même. Figurez-vous que le Traité de Pelindaba va de pair avec un certain nombre d'obligations qui nécessitent une infrastructure lourde et complexe. L'OTICE peut offrir au Traité de Pelindaba une assistance technique unique en renforcement de capacités et un support opérationnel en garantissant un niveau de vérification sans faille. En outre, les technologies de vérification du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) offrent une myriade d'applications civiles et scientifiques dans des domaines variés liés au développement socio-économique et à la sécurité humaine. D'ailleurs, les scientifiques africains l'ont compris et se tournent vers nous pour pouvoir accéder et traiter nos données et produits. En outre, les crises énergétiques de ces dernières années couplées à nos impératifs d'émergence font que le nucléaire s'est imposé dans beaucoup de pays comme une source complémentaire d'énergie. Au demeurant, tout ceci rentre dans le cadre plus global de ce qu'on pourrait appeler la « marche du monde » : les bénéfices comme les risques sont partagés à l'échelle planétaire. Au moment où nous réclamons un rôle plus important du Continent au sein des Nations Unies, au nom de quoi l'Afrique refuserait-elle à être un acteur global et continuer à subir les choix des autres ? Donc, comme vous pouvez bien le voir, l'Afrique a bel et bien un rôle déterminant à jouer dans le domaine.

S. : Revenons sur un de vos hauts faits qui vous a valu d'être distingué comme personnalité dans le contrôle des armes en 2013. Vous avez réussi à convaincre la Chine de fournir des données sur son système de surveillance internationale. Comment vous êtes-vous pris pour faire plier les Chinois ?

L. Z. : C'est vrai que c'est n'est pas toujours facile de négocier avec les Chinois, mais mon atout majeur a été que je viens d'un pays pauvre mais digne comme le Burkina Faso où on respecte les autres. Partout où j'ai été, les gens respectent les Burkinabè, du fait de leur respect de l'autre et de leur hospitalité. C'est très important, car lorsque vous traitez avec les Chinois, ils veulent aussi se sentir respectés. De plus, j'ai eu la chance de travailler pendant 10 ans comme directeur du Centre international des données et cela m'a permis de créer les conditions de confiance pour les amener à m'accepter comme un partenaire sérieux pour eux, autant qu'ils le sont pour moi. Voyez-vous, la dernière personne avec qui ils auraient pu signer un tel accord, c'est bien moi, car le Burkina Faso n'a pas d'accord avec la grande Chine. Mais je suis fonctionnaire international et les Chinois ont su dépasser le caractère national et se sont mis d'accord avec moi pour réussir le pari d'un système de vérification qui soit le plus efficace possible pour la communauté internationale, ça c'est le premier point. Ils ont également convenu de créer les conditions pour sa ratification par les autres pays et son entrée en vigueur. Voilà comment je m'y suis pris. J'ai été surpris par la rapidité de l'accord parce que ça faisait 10 ans que l'Organisation tentait de convaincre la Chine de contribuer à ce système de surveillance international.

S. : Comment avez-vous suivi l'insurrection populaire d'octobre 2014 dans votre pays d'origine, le Burkina Faso ?

L. Z. : J'avoue que j'ai été surpris de la tournure rapide des évènements. Personne ne s'attendait à un dénouement aussi tragique de la crise. On savait la tension monter, mais on pensait tous que l'on allait arriver à un terrain d'entente, une compréhension parce que le Burkina Faso a toujours été une terre de dialogue. Les évènements ont été ce qu'ils sont et nous déplorons aujourd'hui les martyrs et ceux qui sont morts pour cette cause. Nous saluons leur mémoire. Pour moi, nous devons nous appuyer sur cet évènement majeur, qui est une crise du processus de construction, de développement et d'émergence de ce pays. Remercions Dieu parce que le dénouement de la crise a été rapide et que nous sommes dans une situation où nous pouvons tous dialoguer. Que cette crise nécessaire nous ouvre des lendemains meilleurs. C'est à cela que nous devons travailler ; travaillons tous ensemble pour la paix, la concorde, l'harmonie au Burkina. Nous devons œuvrer à éviter ces questions de religion, d'«ethnicisme», et toute autre forme de communautarisme, parce que le Burkina Faso est une terre d'accueil et nous venons tous de quelque part. Vous savez bien que Ouagadougou appartient aux Samos, mais ils l'ont laissée aux Mossis pour aller un peu plus loin (rires). Je dis cela dans le cadre de la parenté à plaisanterie, mais juste pour rappeler que nous sommes un pays de tolérance, donc je souhaite que la tolérance prévale aujourd'hui.

S. : Etes-vous d'avis avec ceux qui disent que le président Blaise Compaoré est sorti de l'histoire par la petite porte ?

L. Z. : Je suis d'avis qu'il aurait pu sortir autrement. J'étais encore étudiant quand il est arrivé au pouvoir. Il y a eu du travail de fait, le Burkina d'aujourd'hui est bien différent de celui de ma période estudiantine. Il faut accepter de reconnaître ce que les autres ont fait et saluer cela. Il y a eu certes des dérapages, mais on dit souvent qu'on ne fait pas d'omelette sans casser des œufs. Assurons-nous que les œufs que nous avons cassés ne dérangent pas nos pieds. Je pense qu'il faut construire le futur en nous appuyant sur cette crise, en essayant de faire en sorte que le comité de réconciliation mis en place soit le plus efficace possible pour qu'il y ait la paix. Une paix durable pour ce pays, parce que nous sommes encore trop pauvres pour perdre du temps à tergiverser sur des questions qui divertissent et font oublier l'absolue nécessité de développement que nous devons amorcer.

S. : Vous bottez en touche, mais est-ce que vous qui travaillez à désamorcer des bombes avez à un moment donné senti la crise ? On sait que vous êtes proche, car il était présent à votre investiture, est-ce qu'à un moment donné vous avez tenté de prévenir cette situation ?

L. Z. : Je suis autant proche du président Compaoré que tout Burkinabè qui accède à de hautes responsabilités pour la fierté du Pays et à qui le président fait l'honneur de sa présence à la cérémonie d'investiture. Que le président Compaoré se déplace à mon installation a été un très grand honneur pour moi ; un honneur que le Faso me faisait à travers son premier Représentant. Je n'ai jamais travaillé directement pour l'Etat burkinabè et on ne peut pas dire que je connais le président Compaoré plus que vous. Je crois que si vous aviez été élu à la tête d'une organisation, il aurait fait de même. Si ça veut dire être proche, alors je salue cet engagement. Je prie qu'à l'avenir, et à situation pareille que le président, quel qu'il soit, puisse faire de même ! Il n'est pas facile d'avoir un Burkinabè qui dirige le contrôle de la non-prolifération des armes nucléaires, c'est ce que le président Compaoré a voulu marquer et saluer au nom du Burkina.

Est-ce que je lui ai parlé ? J'ai eu toujours des discussions constructives avec le président Compaoré. Je l'ai connu quand j'ai été nommé directeur du Centre international des données du Système de Surveillance International (Novembre 2003) et qu'il m'a fait l' honneur d'une audience pour me féliciter : c' était notre premier contact ! J'avais été frappé par son calme et sa perspicacité. C'est quelqu'un de très intelligent. Et jamais ai-je pensé que le président Compaoré mettrait en danger la cohésion sociale au Burkina Faso, jamais. Parce que c'est quelqu'un qui est attaché à son pays ; il avait toutes les raisons suffisantes pour apprécier au mieux les différentes situations et mieux cerner les limites et les marges de manœuvre.

Est-ce que j'en ai discuté avec lui ? Nos discussions ont souvent porté sur les questions internationales ; la paix et la sécurité et l'exemple de démocratie que le Burkina pouvait donner dans la sous-région. Nous avons souvent abordé son rôle de médiation dans les différents conflits et la responsabilité qui lui incombait (en conséquence) de donner l'exemple. Et je crois profondément que cette responsabilité fait que le pire a été évité lors de la crise de fin Octobre 2014.

Mon point de vue a toujours été une alternance, démocratique dans la paix et la sérénité. Je crois que lui aussi y a pensé parce que jusqu'au dernier moment, il n'était pas officiellement candidat. Mais je ne veux pas me prêter à des spéculations. Je veux simplement dire que personne ne doit aujourd'hui se mettre dans une situation de reconnaître s'il a dit ou n'a pas dit quelque chose au président. Il avait été interrogé en marge des discussions sur la paix et la sécurité à New York et il avait répondu qu'il ne mettrait pas en danger la paix et la cohésion sociale. Ce qui est advenu a été une surprise alors qu'il aurait suffi de 24 ou 48 heures d'anticipation pour éviter ce qui s'est passé.

S. : Peut-on penser un jour que vous puissiez revenir dans votre pays pour faire valoir vos compétences surtout dans la politique ?

L. Z. : Je mets déjà mes compétences au service de mon pays parce que je forme des jeunes en collaboration avec le Centre national de recherche scientifique et technologique (CNRST) dans le domaine du contrôle des essais nucléaires et des technologies afférentes. Avec le Ministère des Affaires Etrangères des efforts sont également faits pour intéresser les plus jeunes aux questions de non-prolifération et de désarmement et leur rôle dans la paix et la sécurité internationales.

S. : L'actualité nationale est marquée par le vote de la loi décriée, interdisant des personnes ayant soutenu la modification de l'article 37 d'être candidates aux élections à venir. Quel commentaire cela suscite-t-il en vous ?

L. Z. : Il faut pouvoir donner de la dimension au concept et au contexte de soutien. Ensuite les Juristes se chargent de départager les points de vue. Vous savez, j'avais rêvé être juriste et je me suis retrouvé dans la science. Je me permettrai donc de ne pas épiloguer sur la question. En démocratie, quand on va aux élections, c'est le meilleur qui réunit le plus de suffrage qui gagne. Je n'ai pas suivi au détail près ce processus de décision ou de soutien à l'article 37 qui s'est manifesté au niveau des partis politiques. Ce que je sais, c'est qu'il y avait un Front républicain, une opposition et différents partis qui étaient contre. Le non soutien ou le soutien à la modification de l'article 37, ne doit pas perturber la commission de réconciliation qui est en train d'être mise en place ; il est important de réussir la réconciliation de toutes les filles et fils du Burkina. La Transition a besoin de tout le monde pour qu'on la réussisse ; les élections à venir ont besoin de tout le monde pour être réussies. Espérons que le débat, le dialogue et la tolérance vont prévaloir dans des conditions qui nous permettent d'aller aux élections dans la sagesse, l'hospitalité, le respect et la dignité que l'on a toujours reconnus aux Burkinabè.

S. : Mais l'exclusion est consommée.

L. Z. : Le Burkina Faso a surpris tout le monde en réglant la question de la crise en trois semaines, en ayant une Charte qui a permis d'avoir un Conseil national de la Transition, un gouvernement, un président de la Transition aussi rapidement. Cela a forcé le respect de la communauté internationale ! Voyez-vous ? J'ai eu des remarques du genre: «M. Zerbo, quand nous avons vu à la télé les Burkinabè nettoyer les rues après avoir cassé, nous comprenons pourquoi vous dites que Burkina Faso veut dire terre des Hommes intègres». Ça vous rend fier malgré tout. Alors, focalisons-nous sur ce qui nous unit, plutôt que sur ce qui peut nous diviser aujourd'hui. Que le Burkina Faso porte son nom et que nous portions ce nom en nous-mêmes en cultivant la tolérance, la paix et en résolvant nos problèmes de façon à éviter toute haine ou toute «chasse aux sorcières ». Voilà mon souhait.

S. : L'actualité est aussi marquée par des arrestations d'ex-dignitaires du régime Compaoré. Est-ce que cette situation vous inquiète ?

L. Z. : Toute arrestation inquiète. Mais je crois que les juges sont là pour ça. On doit créer le cadre légal qui justifierait ces arrestations et pour que les populations ne se sentent pas apeurées ou lésées ; c'est ça qui est important. Il faut être transparent sur le pourquoi et le but des arrestations. Il faut communiquer pour expliquer plutôt que de laisser le flou et la rumeur engendrer la peur.

S. : Quelle appréciation faites-vous alors de la gestion de la Transition du président Kafando ?

L. Z. : J'ai rencontré le président Kafando (en 2004) quand il était le représentant du Burkina Faso auprès des Nations unies. Il m'avait fait l'honneur de me féliciter à l'époque pour ma nomination comme Directeur du Centre international des Données du Système de Surveillance International. Il est très vite apparu comme un homme de foi et nos discussions ont porté sur le spirituel, les lois de la nature et bien sur la parenté à plaisanterie !! On avait également évoqué la nécessité de travailler à offrir plus d'opportunités aux Burkinabè dans les organisations Internationales. Ces conseils avaient été bien notés et je suis fier d'avoir inspiré, recruté et contribué à donner des chances à quelques Jeunes Burkinabè dans les organisations du système des Nations Unies. Pour revenir au President Kafando, je terminerai en disant qu'en bon diplomate de carrière, il est bien indiqué pour apaiser les esprits et mettre son expérience au profit des jeunes. Nous avons besoin de faire le pont entre la jeunesse et ceux qui ont plus d'expérience pour le développement et le rayonnement du Burkina. Je pense que c'est ce que le président Kafando s'efforce de faire avec le soutien de l'équipe autour de lui. Il a aussi besoin du soutien de toutes les franges de la population pour mener à bien la Transition vers des élections que nous voulons justes, certaines et effectives. Il est grand temps pour un cycle d'alternance démocratique au Burkina Faso.

S. : Vous n'avez donc rien à reprocher à la Transition ?

L. Z. : Dois-je reprocher quelque chose à un processus qui a été accepté par le peuple burkinabè ? Non, pourvu que la Transition nous conduise vers des élections justes qui posent les bases solides d'un processus d'alternance démocratique qui soit au service de la tolérance, du développement et de l'émergence du Burkina Faso.

S. : On a remarqué que bien souvent en Afrique, lorsqu'il y a des transitions, on fait appel à des fonctionnaires internationaux de ces pays. Avez-vous été approché, si non, est-ce que vous auriez accepté si cela avait été le cas.

L. Z. : J'avais été informé par un membre de mon cabinet du fait que mon nom était évoqué dans ce sens. J'ai naturellement pris cela comme un honneur. J'ai également eu l'honneur d'être contacté directement et/ou indirectement par des acteurs de la scène politique nationale. Mais voyez-vous, je suis à un poste électif ; élu par plus de 180 états qui m'ont accordé leur confiance et confié des responsabilités et un mandat bien déterminé qui m'oblige.

Sur la situation nationale elle-même, j'avais échangé avec le Secrétaire Général Ban Ki- Moon qui était de passage à Vienne durant la semaine qui a suivi les évènements d'Octobre. Je crois que ces échanges ont contribué quelque peu à la coordination des efforts de la communauté internationale sur la crise au Burkina Faso. La preuve de mon attachement au pays.

S. : Parlant de démocratie, que pensez-vous de la démocratie en Afrique surtout des élections dans certains pays et bientôt au Burkina Faso ?

L. Z. : Je pense que le Nigeria a donné un exemple de démocratie en Afrique de l'Ouest, qu'il faut respecter. Beaucoup d'observateurs prédisaient une catastrophe, des guerres. Je crois qu'il faut saluer l'attitude du président Goodluck Jonathan de reconnaître sa défaite et éviter le chaos. Les résultats d'une élection doivent être assez rapides pour ne pas permettre à la rumeur de persister sur les camps gagnants ou perdants. Sur la base de statistiques fiables et du travail rigoureux et transparent des instituts de sondages les écarts peuvent permettre à un des camps de rapidement reconnaitre la victoire de l'autre. Cela va sauver la démocratie et aider ce pays à aller de l'avant. Le Nigeria a donné l'exemple. Espérons qu'il en soit de même pour le Burkina.

S. : Revenons aux élections dans le cas du Burkina où les sondages donnent Roch Marc Christian Kaboré, Zéphirin Diabré, favoris avec un Djibill Bassolé en embuscade. Est-ce que vous avez une préférence pour l'un ou l'autre ?

L. Z. : Moi, j'ai une préférence pour le meilleur des Burkinabè qui dirigera au mieux ce pays. Parce que, nous avons besoin de repartir du bon pied ; de rassurer nos populations. Il faut bien finir la Transition pour permettre le fonctionnement durable de nos institutions. Que le meilleur gagne et qu'il ait la sagesse de coopérer avec les perdants dans l'esprit de la réconciliation nationale. De même et en toute élégance, celui qui perd, doit pouvoir accepter le verdict des urnes dans l'intérêt national. C'est ce qui est important... car l'histoire se charge toujours d'effacer ce qui importe peu et de garder l'essentiel... et l'essentiel pour le Burkina aujourd'hui c'est la cohésion sociale ; gage de lendemains meilleurs !

S. : Et si le meilleur justement en 2015 gagnait et qu'il vous faisait appel, accepteriez-vous de rentrer pour l'aider à la mise en œuvre de sa politique et occuper un poste de responsabilité ?

L.Z. : Pour le moment, je suis élu Secrétaire Exécutif d'une Organisation Internationale et fort de la confiance de plus de 180 Etats. J'ai un mandat courant jusqu'en 2017 et une responsabilité à honorer mes engagements. Pour le moment, aidez-moi à bien accomplir ma mission là où je suis. Ce sera un grand service rendu au Burkina Faso.

S. : Le vote des Burkinabè de l'étranger n'aura pas lieu en 2015.

L.Z. : Le comble, c'est que je n'ai jamais voté et cela me fait mal. Je n'ai jamais voté parce que les Burkinabè de l'étranger n'ont jamais voté et que je ne me suis jamais retrouvé au Burkina lors d'une période électorale ! Pour les Burkinabè de l'étranger, la participation aux discussions, aux débats entre amis en essayant de contribuer d'une certaine façon au processus en cours, constitue la seule consolation d'un vote qui se veut virtuel pour le moment. On y croyait cette année parce que la Commission Electorale Indépendante a effectué des missions encourageantes auprès des Burkinabè de l'étranger.

S. : Est-ce que le report du vote des Burkinabè de l'étranger vous a peiné ?

L.Z. : Je n'utiliserais pas le mot peiné. Si les conditions sont réunies pour permettre aux Burkinabè qui sont à l'étranger de voter, cela fait une participation effective. Nous pouvons nous sentir partie intégrante du processus. Nous sommes à Vienne, quelque 100 à 200 Burkinabè, mais, il y a des communautés qui sont des millions qui vont se sentir exclues de ce processus. C'est ce qui peut frustrer un peu. Mais, je pense qu'il faut simplement communiquer sur le fait que les conditions ne sont pas réunies en ce moment et expliquer que le Burkina travaille à cela. C'est ça aussi le développement, permettre à tout citoyen qui veut participer au suffrage de son pays, de le faire ! Nous prions pour que les conditions soient réunies. Si ce n'est pas possible maintenant, permettre à l'avenir le vote aux Burkinabè de l'étranger serait une très bonne chose pour notre démocratie.

S. : La montée du djihadisme vous inquiète-t-il ?

L.Z. : Je me suis posé cette question car l'Islam et les musulmans se retrouvent stigmatisés. Boko Haram, ce n'est pas l'islam, même s'il se réclame de la religion musulmane. L'Etat islamique, ce n'est pas l'islam. J'ai récemment suivi un reportage d'une télévision Française qui évoquait la question juste après l'Affaire Coulibaly et l'attaque odieuse du supermarché Casher: j'ai été très frappé par un jeune de 11 ans qui écoutait une femme dont le fils avait été tué par Mohamed Merah. Une femme qui s'était donnée comme mission de parcourir les lycées et collèges pour essayer de sensibiliser les élèves à la tolérance. Le jeune homme a posé la question suivante : "Madame, est-ce que je dois avoir peur aujourd'hui ?" La femme lui a demandé pourquoi ? Il donna un détail de plus par une autre question : ''Est-ce que quand vous vous appelez Coulibaly, on ne doit pas avoir peur aujourd'hui '' ? Elle lui redemande pourquoi ? Et la réponse fut cinglante ! ''Parce que moi, je suis noir, je suis musulman et je m'appelle Coulibaly, c'est pour cela que je me pose des questions ''. Il n'avait que 11 ans ! Pourquoi, s'est-il posé cette question ? Vous conviendrez avec moi que la question vient de la stigmatisation que le jeune garçon perçoit à travers les medias. Au-delà de la transmission effective de l'information, les media doivent prendre en compte le fait qu'ils représentent un miroir des activités et modèles culturels en place. Vous avez donc votre rôle et un grand rôle à jouer ! Aujourd'hui plus qu'hier, et a contrario de la mondialisation et la globalisation les problèmes de communauté sont devenus des facteurs de déstabilisation. Nous ne devrions pas voir les choses en termes de religion, d'ethnie. Nous ne devons pas opposer les religions les unes contre les autres ! Nous croyons au même Dieu Tout Puissant ; c'est cela l'Essentiel. Je vais en Israël demain (Ndlr : 11 avril 2015). J'ai visité Israël plusieurs fois. Je vais vous dire une chose qui m'a choqué. Sur 1 km, vous avez la mosquée Al-Aqsa. Vous avez Golgotha. Vous avez les musulmans, les chrétiens, les arméniens, les catholiques qui vivent tous en communauté. Ils y sont tous. Et, ils se réclament d'une religion monothéiste. Moi, je suis allé à la mosquée d'Al-Aqsa et j'ai prié avec le Cheick. Je suis allé au mur des lamentations, j'ai porté la Kipa en respect à ce lieu sacré pour les juifs. Je suis allé au Golgotha. Je suis allé à l'église de la Nativité. Je suis allé à Nazareth et Bethlehem ; J'ai aussi foulé les eaux du Jourdain ! Pourquoi ? Parce que, je suis d'un père musulman et d'une mère catholique. C'est ça la réalité. Est-ce que vous voulez que je dise que la religion musulmane est mieux que la religion chrétienne ou que la religion chrétienne est mieux que la religion musulmane ? Ce qui est important, c'est la foi. C'est votre relation personnelle avec Dieu. Il faut cultiver la tolérance et travailler à éviter toute stigmatisation de communautés. Je pense que ces questions de Boko Haram, de terrorisme sont des questions qui tirent leur source ailleurs que dans la religion. Les gens utilisent la religion pour faire cas de leurs frustrations. Essayons d'aller à la source de leurs frustrations. La source de leurs frustrations, c'est le besoin de développement, plus précisément les inégalités sociales profondes qui compromettent la tolérance, l'harmonie et l'acceptation de l'autre.

S. : Est-ce que la stigmatisation dont vous parlez n'est pas due au fait qu'il y a un amalgame entre islam et terrorisme puisqu'on tue au nom de la religion ?

L.Z. : Oui ! Mais ceux qui tuent au nom de la religion musulmane ne représentent pas l'Islam. Parce que pour qui connaît le Coran, sait que la vie humaine est sacrée ! Donc, comment pouvez-vous dire que vous tuez au nom de la religion musulmane, si la religion même vous dit que vous ne pouvez pas tuer quelqu'un ? Je crois que c'est un refuge pour noyer d'autres frustrations plutôt qu'un problème religieux. Quand vous voyez comment, on détruit l'héritage mondial et toutes ces sculptures en Irak et ailleurs, sous le prétexte que personne n'a le droit d'adorer autre chose que Dieu, on doit se poser des questions sur le concept même de l'évolution humaine. L'humanité a quand même subi des changements. L'islam est venu à un moment donné, la chrétienté aussi. Mais, il y a eu des cultures avant. Il faut quand même respecter ces cultures pour essayer d'aller de l'avant.

S. : Nous nous acheminons vers la fin de cet interview. Mr Zerbo a t-il des regrets ?

L.Z. : Je regrette ce que je n'ai pas fait. Parce que je fais tout toujours avec foi. Même s'il est négatif, il m'aide à préparer le positif. J'ai un regret, mais il est émotionnel, parce que j'aurais voulu (long silence et larmes) que mon père soit là aujourd'hui. J'aurais voulu qu'il voie le fruit de tous les sacrifices qu'il a faits. C'est cela mon regret.

S. : Qu'est-ce que vous préférez quand vous n'êtes pas pris dans les angoisses du contrôle nucléaire ?

L.Z. : J'aime le football. Je me rappelle que quand je jouais et lorsque je tombais, ma priorité était de me nettoyer les pieds avant de courir derrière le ballon. C'est pour ça que je n'ai jamais été un bon footballeur. J'aime aussi la musique et j'aime les gens. J'aime les gens parce que je trouve qu'on ne fait jamais rien tout seul et que c'est ensemble qu'on peut avancer. J'aime les gens parce que je sais que j'ai pu bénéficier de l'expérience de beaucoup pour être là où je suis. Je veux donner la même chose et que tous ceux que je rencontre puissent bénéficier de ce type de rencontre.

S. : Quelles sont vos valeurs ?

L.Z. : La tolérance, la fraternité, on peut ajouter l'amitié, la passion, parce que rien ne se construit sans passion. La foi aussi parce que quand vous ne l'avez pas, et que vous voulez toucher à tout, il faut des valeurs, c'est ce que la religion nous apprend. Je ne vous demande pas d'être religieux, mais plutôt d'avoir la foi, et la foi, quelle que soit la confession religieuse, elle vous permet de vous dépasser. Il ne faut jamais se dire : «Je suis là où je suis parce que je suis le plus grand, le plus beau». Il y avait des gens plus forts et plus intelligents que vous avez connus dans vos différents lycées et collèges mais qui, aujourd'hui, n'ont pas eu la chance d'être rédacteur en politique ou autres. Est-ce que vous vous êtes demandés pourquoi ? Moi je me suis posé la question, parce que je me suis mis à leur place. Et quand vous vous mettez à leur place, c'est cela qui vous ramène à vous-mêmes pour savoir que vous avez bénéficié de quelque chose, que Dieu a été là pour vous. Ce n'est pas que Dieu n'a pas été là pour eux. Dieu est là pour tout le monde, mais il faut savoir l'écouter. Donc, mettez-vous à l'écoute de Dieu et de votre foi et permettez-vous d'aller de l'avant et de vous développer et de faire bénéficier aussi à tous ceux qui vous entourent.

S. : Avez-vous un animal préféré?

L.Z. : J'adore le chien, parce qu'il est fidèle.

S. : Vos défauts ?

L.Z. : J'ai les défauts de mes qualités. Je suis quelqu'un de passionné et parfois la passion peut vous amener à ne pas être compris. Et quand vous n'êtes pas compris, les gens peuvent voir en vous plusieurs défauts. C'est une question qui m'a été posée à l'audition des candidats pour le poste de Secrétaire exécutif de l'OTICE. Et j'ai dit que j'ai les défauts de mes qualités et les qualités de mes défauts aussi, parce que vos défauts s'expriment à travers la passion de ce que vous voulez faire. Moi, je suis passionné par tout ce qu'on met devant moi et je le fais profondément. Je veux le réussir et je veux que les gens autour de moi le réussissent avec moi. Et en voulant le faire parfois, on a l'impression que vous poussez les uns et les autres. Mais, moi, je ne pousse pas les gens parce que je ne veux pas vivre la vie de quelqu'un d'autre. Je veux vivre ma vie, respecter celle des autres et leur permettre aussi d'aller de l'avant. Mon défaut, c'est d'avoir été émotif aujourd'hui. C'est une question que je n'aime pas aborder parce que j'ai perdu mon père en 2000 et ça a été le plus grand choc de ma vie.

S. : Vous n'avez que des filles. Est-ce que vous ne regrettez pas le fait de n'avoir que des filles ?

L.Z. : Pourquoi ? Il y a d'autres qui cherchent à avoir des enfants parce qu'ils n'en ont pas. Quand vous en avez et vous voulez choisir, il faut vous poser des questions. C'est ma foi qui fait que je ne peux pas regretter. Il ne faut jamais refuser ce que Dieu vous donne, il faut l'accepter et se dire qu'il a des raisons de vous donner des filles et pas des garçons. C'est Dieu qui est le maître de tout. Quand vous avez la foi, vous ne faites pas de différence. Dieu ne fait pas de différence, il veut créer une société où on peut se mélanger. Il ne faut jamais refuser ce que Dieu vous donne. Je suis fier de mes filles et elles m'adorent comme tout. Pour le moment, je suis leur chéri en attendant qu'elles trouvent un mari.

S. : Le Burkina Faso est devenu un pays des mines. Quels conseils vous donnez aux Burkinabè pour que véritablement ils puissent en profiter ?

L.Z. : Le secteur minier est un secteur assez délicat. Il faut d'abord que le Burkina ait un code minier compétitif qui attire les investisseurs. Apres, il faut s'assurer que les sociétés qui y interviennent puissent faire bénéficier les populations locales. Quand vous allez dans une région où il n'y a que trois ou sept cases, vous faites de l'exploration et vous en venez à développer une mine, ce que les populations locales veulent c'est d'en finir avec la précarité, d'avoir des écoles, des centres de santé et de promotion sociale et de pouvoir bénéficier des retombées de ce que vous exploitez.

Au Burkina Faso, on n'a pas été gâté par la nature sur le plan minier (comparativement à la Guinée, au Ghana, au Mali ou au Niger; pour ce qui est des connaissances actuelles), mais il ne faut pas désespérer parce que les technologies évoluent. On se trouve dans une situation où on a fait de l'exploration dans des endroits où on n'a rien trouvé, mais les technologies d'aujourd'hui peuvent vous permettre de trouver dans des endroits où les technologies d'antan n'ont rien trouvé, il y a donc matière a toujours espérer.

Mais les sociétés investissent quand il y a la paix et la sécurité. Prions Dieu pour qu'on ait toujours la paix et la sécurité et prions pour que le code minier soit toujours aussi attractif pour les investisseurs et à la hauteur des attentes des populations.

S. : Est-il vrai que là où il y a de l'or, il y a du pétrole ?

L.Z. : Le pétrole et l'or ne sont pas forcément au même endroit ou dans le même contexte géologique. En réponse a votre point sur fait qu'on ne trouvera jamais du Pétrole au Burkina. Je dirai que ce serait aller un peu trop en besogne. Les développements récents et continus des sciences et technologies en explorations ont permis des découvertes dans des zones initialement (a une certaine époque je veux dire) considérés comme stériles sur plan de leur potentiel en gisement pétroliers. Sait-on Jamais ? Avec les progrès scientifiques qui continuent. Peut-être qu'un jour, on trouvera des indices de pétrole en-dessous de ces roches vertes (connues sous le nom de Birimien) au Burkina.

La rédaction

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