Zida, premier ministre sous pression : Il faut coûte que coûte, sauver la transition

| 09.07.2015
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Zida, premier ministre sous pression : Il faut coûte que coûte, sauver la transition
© DR / Autre Presse
Zida, premier ministre sous pression : Il faut coûte que coûte, sauver la transition
En temps normal, un Premier ministre qui quitte une réunion gouvernementale n'aurait pas fait ciller un moustique, encore moins fait courir les médias, au point de créer la panique dans les cabarets et les ménages des Burkinabè. Mais dans le contexte actuel, le Premier ministre, quittant le palais présidentiel hier, avant la fin du Conseil des ministres apparaît comme une chauve-souris se promenant en plein jour. Ce qui est une situation très anormale voire insolite dans l'entendement du règne animal et humain.


Une anormalité qui trouve des vents favorables à son exacerbation, puisque les raisons de cette «petite» absence du chef du gouvernement voltigent comme des fruits balancés par la mousson. Si ce n'est pas un porte-parole du gouvernement qui dit que Yacouba Isaac Zida avait des dossiers urgents à gérer, c'est le ministre de la sécurité qui assure qu'il a juste eu un coup de fatigue. De deux choses, l'une : ou Zida est malade ou il avait des «dossiers urgents» à gérer.

En effet, les versions sur ce départ précipité du chef du gouvernement à cet hebdomadaire réunion ministérielle, au palais présidentiel divergent :

  • pour le ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, Frédéric Nikièma, le PM avait des urgences, et il est allé les régler ;
  • pour son homologue de l'administration territoriale, il est très fatigué, mais pas «malade». Ou se situe la vérité ?

Chacun se souvient de la grosse fatigue qui avait mis momentanément, Djibrill Bassolé dans les pommes, en Turquie, devant les caméras. C'est ce qu'on appelle un coup de barre, qui peut provoquer un évanouissement. Yacouba Isaac Zida, a-t-il senti ce coup de barre et a préféré s'éclipser ? Pourquoi alors, aller au bureau, et non à domicile pour se reposer. A la vérité, il y a de quoi et Zida est de nos jours un PM transi et sous pression malgré des dehors rassurants. Lui au moins, n'est pas un fusible, écrivions-nous au lendemain de la pichenette politique qui lui avait permis de quitter le poste de président du Faso pour endosser le costume de PM.

En effet, adoubé à l'époque par l'armée, y compris le RSP et toute la Grande muette, porté aux nues par les organisations de la société civile, et les jeunes chauffés à blanc sur une place Tahrir, pardon, une place de la nation, Yacouba Isaac Zida est devenu Premier ministre, sous de bons auspices. Mais voilà, un mois après, les choses ont commencé à se gâter.

Première alerte dès le 30 décembre, le RSP a perturbé un conseil des ministres. C'est qu'entre-temps, la lune de miel entre l'ex-n°2 du RSP et ses anciens compagnons d'armes s'est transformée en fiel. Zida, qu'on disait envoyé par le RSP, s'est à l'évidence affranchi et a évoqué des sujets qui fâchent : les dossiers Thomas Sankara et Norbert Zongo ou plutôt a permis, d'en donner un coup d'accélérateur ;

Second coup de semonce : le 4 février 2015, deuxième perturbation du conseil des ministres, et exigence du RSP que Zida et les 3 autres militaires quittent le gouvernement ;

Enfin, dans la nuit du 29 au 30 juin 2015, embrouillamini total sur ce que voulait faire le RSP. Réalité ou fiction ?

Le gouvernement gagnerait, dans tous les cas, à harmoniser sa communication pour éviter que Dame-Rumeur, qui a pris de sérieux galons, pendant ces deux dernières semaines, ne s'installe désormais, comme la vraie régente de l'information gouvernementale et prête à faire gober au pauvre citoyen perdu n'importe quelle grenouille qui passe sous ses yeux.

En attendant, on espère que la recette que prépare le président Kafando, au four et au moulin depuis plus de quatorze jours, sentira en fin de compte bon pour aiguiser l'appétit de la transition et l'amener à rester à la table des délais impartis. C'est désormais ce qui importe et c'est vers cela que tout le monde, sans exception (armée dans toutes ses composantes, société civile, ancienne opposition, ancienne majorité, gouvernement, etc.), devra tendre.

Or, depuis le 8 juillet dernier, l'ex-majorité, le RSP et toute l'armée exigent le départ de Zida.

Certes, l'actuel PM du Burkina n'est pas exempt de critiques, et souvent la lisibilité de ses intentions voire de ses actions n'est pas nette, et il arrive qu'on lui prête un agenda caché. Ses accointances avec les OSC sont aussi de notoriété publique, alors que certaines OSC n'en mènent pas large, et n'ont d'OSC que de nom étant de vrais officines politiques. La faute à ce niveau, aux politiques qui ont abandonné la transition, rivés sur les élections oublieux d'une chose: il faut d'abord y arriver sans anicroche. Les récentes tournées de Zida dans les garnisons militaires, notamment à Gaoua et à Tenkodogo, ont provoqué l'ire, semble-t-il, de la hiérarchie militaire.

Mais, mais à 92 jours d'élections aussi décisives, censées remettre le Burkina sur les rails, et surtout montrer que l'exemplarité dont nous a affublé François Hollande et dont les Burkinabè se gargarisent ne doit pas finir en eau de boudin, autrement dit, à un mirage. Dans ce cas d'espèce, il aurait fallu laisser Blaise Compaoré continuer, car on connaît comment déraper une transition mais, quand à sa fin, personne ne peut le prévoir.

Des voix s'élèvent pour dire qu'une démission de Zida ne saurait hypothéquer les élections, mais un changement de gouvernement à l'heure actuelle, impactera au mieux un report des élections, au pire, leur annulation, et bonjours la chienlit.

Car à imaginer un chamboulement du timing électoral, il est fort probable que certains évoqueront les délais constitutionnels pour brandir d'autres problèmes.

II FAUT DONC COUTE QUE COUTE SAUVER LA TRANSITION, c'est la seule bouée de survie pour un pays tel le Burkina, qui ne pourra pas supporter même une semaine de crise à l'ivoirienne ou à la centrafricaine.

Quelle que soit donc la solution qui sera trouvée et estimée comme étant la meilleure, elle doit impérativement se marier et être compatible avec la tenue le 11 octobre 2015, de la présidentielle et des législatives. Tout autre aménagement est nul et non avenu.

Il n'est en effet, pas concevable de pouvoir conduire la charrette, avec force transpiration et douleur pendant huit mois, et qu'à quelque trois mois de la fin du calvaire (car oui, cette transition en est un), des tergiversations liées (à tort ou à raison) à des calendriers cachés, des problèmes d'ego et des considérations individuelles peu comparables à l'intérêt national, se prévalent de vouloir empêcher le peuple burkinabè de renouer avec le train de la démocratie.

Il faut sauver la transition et cela, quel qu'en soit le prix. Tous les Burkinabè y gagneront. C'est le seul combat actuel qui vaille !.

Ahmed BAMBARA

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