La délibération du Conseil constitutionnel, le 25 août dernier, sur le recours relatif aux candidatures législatives du CDP et alliés, laquelle délibération a invalidé 42 dossiers, et la sortie dans la foulée de l’ex-majorité, incitent à répondre par l’affirmative.
Déjà, le 13 août courant, alors que le Conseil constitutionnel avait reçu plusieurs recours contre le CDP, le parti de l’ex-président Blaise Compaoré, avait fait une sortie tonitruante, sous la forme d’une conférence de presse, qui s’apparentait à un procès en iniquité contre cette haute juridiction : le ton avait été véhément, et les menaces à peine voilées, voire très claires sur les ondes de notre confrère RFI, même si après, l’actuel capitaine du CDP a crié à une déformation de ses propos par... les journalistes.
En substance, le chiffon rouge brandi par le CDP ce jour-là, était que soit le Conseil constitutionnel donnait son blanc-seing à ses poulains pour compétir le 11 octobre, soit il n’y aura pas d’élections ! En fait, comme un pistolet posé sur la tempe des juges constitutionnels qui devaient obtempérer, sinon...
Ce 26 août 2015, au lendemain donc de l’application des articles 135 et 166 du code électoral, qui expurge de nombreux bonzes CDépistes de la course, Eddie Komboïgo et ses ouailles remettent encore une couche : la décision des «sages» est partiale, et il n’est pas question de s’y soumettre. La politique de la chaise vide et la désobéissance civile seront leurs armes, face à cette invalidation, qui est une «forme de transmission du pouvoir» qui ne dit pas son nom.
L’argumentaire du CDP est donc limpide en ce 26 août, et dans la tonalité pointent toujours la colère et la frustration : la transition sème tous les écueils sur son chemin pour l’empêcher d’envoyer ses représentants quérir l’onction populaire.
Ainsi, les proscrits du Conseil constitutionnel croient dur comme fer que s’ils sont sur la ligne de départ, ils seront les grands vainqueurs dans l’isoloir.
La logorrhée anti-Conseil constitutionnel du CDP n’est pourtant pas injustifiée en partie, du moins si l’on s’en tient aux attendus du verdict de la Cour de justice de la CEDEAO, en date du 13 juillet 2015. Cette justice supranationale avait retoqué la loi électorale du 7 avril 2015, et replacé le CDP et ses comparses dans le jeu politique, puisque le verdict prônait l’inclusion et rejetait cette loi qui frappait dans le tas sans discernement.
Ensuite, le président du Faso, Michel Kafando, avait également affirmé que le Burkina Faso se plierait à l’autorité de la chose jugée, et se conformerait aux décisions de la CEDEAO.
Enfin, pour la paix sociale, le CDP était convaincu qu’on en arriverait pas là. Cependant, si ces invectives teintées de détresse n’émeuvent pas trop grand monde, et à la limite, font monter la moutarde au nez de Burkinabè, c’est qu’ils sont nombreux qui pensent que le CDP aurait dû au mieux, participer aux législatives, avec de nouvelles têtes, au pire, s’éclipser, faire sa réelle mue et rebondir en 2020. L’axiome est bien connu sous les tropiques : quand on chute, on ne regarde pas ou l’on est tombé, mais sur quoi l’on a buté.
Amnésiques, certains CDépistes sont oublieux que même si la révolution burkinabè des 30 et 31 octobre 2014 est restée inachevée, l’esprit de l’insurrection lui, est toujours prégnant, et le désir de changement de paradigme politique réel. Le peut-on vraiment avec le CDP, même sans Blaise ? Peu probable !
Enfin, la personnalité du président du Conseil constitutionnel ne laissait place à aucun doute : Kambou Kassoum, trempé dans le MBDHP, ayant dirigé d’une main de maître la Commission d’enquête indépendante (CEI) dans l’affaire Norbert Zongo, est resté égal à lui-même, impartial, et faisant pour certains, un pied de nez au verdict d’Abuja. Même s’il semble en avoir tenu compte, puisque sur 245 potentiels inéligibles seuls 42 ont été frappés pour cette première fournée.
Alors, si le boycott des prochaines échéances, décidé par le CDP, se comprend, car la participation à un scrutin ou non, reste du ressort exclusif du parti, on se demande sous quelle forme, par contre, va être enrôlée la désobéissance civile. Pacifique ou semée de boucan ? Cette conférence de presse post-verdict du Conseil constitutionnel n’est pas de bon augure. Des semaines crisogènes au Faso ? On a beau dire que le CDP ne peut rien faire encore, quand une partie du peuple gueule et désobéit... ça pose problème. A moins que le CDP n’applique l’article 184, en remplaçant ses recalés et pose le masque de la colère sur le visage de l’apaisement. A J-45 le Burkina vit de nouveau des jours difficiles après ceux ceux du 30 décembre 2014, des 4 février et 28 et 29 juin 2015.
Joachim DE KAIBO