Pendant ce temps, le fils du richissime Dianguinaba Barro, Karim, ex-maire de l'arrondissement n°6 de Bobo-Dioulasso et Assita Ouattara, transfuge du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), ont été alpagués par la police judiciaire des Hauts-Bassins. Ces hommes ont été déposés à l'ombre chaude, dans des conditions similaires à celles que vivent déjà trois anciens ministres, Jean Bertin Ouédraogo, Salif Kaboré et Jérôme Bougouma. Il faut y ajouter le célébrissime Salia Sanou, ancien maire de Bobo-Dioulasso, Seydou Sanou, ancien maire de l'arrondissement n°5 de la capitale économique, Adama Zongo, ex-maire de Tanghin-Dassouri et président de la FEDAP/BC, Joanny Ouédraogo, ex-maire de Boulmiougou, Rasmané Ouédraogo, président de la Nouvelle alliance du Faso (NAFA). Les chefs d'accusation qui pèsent sur eux, parlent d'eux-mêmes. Atteinte à la sûreté de l'Etat, surfacturations et malversations dans l'exécution des marchés publics, activités politiques illégales, malversations dans les lotissements, troubles à l'ordre public et incitations de trouble à l'ordre public. Trop suffisant pour rendre le reste de leur vie saumâtre. C'est à croire que la lune de leur malheur commence à monter à l'horizon. D'ores et déjà, qu'ils éprouvent du mal à rencontrer leurs conseils, on peut présager qu'ils vont affronter des fournaises infernales. Comme on le voit, ces arrestations sont bien accueillies dans certains milieux même si la procédure juridiquement est discutable. Et d'aucuns demandent même d'aller plus loin, en arrêtant l'ancien argentier du système Compaoré, qui, pendant plus de sept ans, s'est gavé ostentatoirement, au mépris des aspirations légitimes des masses laborieuses qui n'avaient que leurs yeux pour pleurer. Ce serait bien de l'arrêter et de l'auditionner aussi, pour qu'il dise enfin, comment l'argent du contribuable a été géré. Ce serait l'occasion pour lui de revenir sur l'utilisation des multiples aides bilatérales et multilatérales. Mais, comme toute médaille à son envers, l'on craint que ces arrestations en cascade ne débouchent sur des règlements de compte, s'ils ne le sont pas déjà.
Il faut s'attendre donc à ce que des dignitaires du régime Compaoré, qui ont des choses à se reprocher, prennent la poudre d'escampette. Et à ce sujet si Jérôme Bougouma et Jean Bertin n'ont jamais quitté le Faso préferant rester au pays depuis l'insurrection, l'on se demande pourquoi par exemple un Salif Kaboré est revenu de sitôt au Burkina lui qui avait posé ses valises à Abidjan ? Bien sûr il peut dire qu'il ne se reproche rien, qu'il est Burkinabè, mais pour certaines raisons et certains préjugés tenances n'était-ce pas mieux pour lui de faire le dos rond dans la capitale Ivoirienne ? Pour ceux qui sont hors des frontières, des ministres, des ambassadeurs et autres serviteurs zélés du clan Compaoré, il ne faudrait pas être surpris qu'ils se constituent en exilés politiques. Surtout qu'on ne sait pas qui sera le prochain sur la liste.
Quoi qu'il advienne, on peut admettre que les ministres Jérôme Bougouma, Salif Kaboré et les anciens maires, Joanny Ouédraogo et Adama Zongo soient arrêtés pour des malversations et des surfacturations. Ce faisant, on constate que le ministre Bougouma serait pressenti pour porter les couleurs du CDP à la prochaine présidentielle. Serait-ce un candidat dérangeant ? En ce qui concerne Salia Sanou, on sait aussi que c'est un vieux baroudeur qui ne recule devant rien. Il a su remobiliser les désirs d'avenir de ses militants, à l'occasion d'un méga meeting à Bobo-Dioulasso. Quant à Rasmané Ouédraogo, on peut déplorer son propos cavalier, selon lequel, il n'y aura pas d'élections sans son mentor, Djibrill Bassolé. Cela dit, il ne mérite tout de même pas d'être détenu dans cette espèce d'amphore de fer. Il sied que les autorités de la transition n'outrepassent pas leur pouvoir. S'il se trouve que ce sont elles même qui, en mal de publicité, ont entrepris d'arrêter les seconds couteaux du régime Compaoré, pour reprendre la main, on dira tout simplement que c'est regrettable. S'il se trouve encore qu'elles ont été inspirées par des étalons de la saynète politique, craignant de perdre des voix sur le chemin qui mène à Kosyam, c'est dégueulasse.
Pour tout dire à l'heure qu'il est, nombreux sont les Burkinabè qui se demandent s'il s'agit véritablement d'une opération main propre ou d'une opération cosmétique, pour écarter des disperseurs de voix. Elle requiert une réponse des autorités de la transition. Le citoyen lambda n'attend plus des paroles, mais des actes. Il aimerait voir une opération main propre qui s'étende à toutes celles et tous ceux qui auraient quelque chose à se reprocher. Par ailleurs, il souhaiterait surtout que l'équipe de Zida se consacre plutôt à définir le cadre d'évolution de la jeune démocratie en construction. De fait, il serait intéressant que le gouvernement se penche sur les aspirations du peuple pour en faire un mémorandum, avec des échéances, comme des organisations de la société civile le font, sous d'autres cieux.
Ce document pourra être soumis à la signature des candidats à la présidence du Faso qui s'engeraient à réaliser tel ou tel autre projet, s'ils sont élus .
Christian N. BADO