Le Dr Abdoul Karim Saïdou explique d’abord que la portée de l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014, en sociologie, est considérée comme une révolution politique, et non sociale, dans le sens où c’était la manière de gouverner qui a été remise en cause. Cette insurrection a donc amené un courant politique hétérogène, avec des socio-démocrates par-ci, des libéraux par-là, entre autres.
Les acquis de cette insurrection ont ainsi emmenés des mesures sociales que la transition a dû prendre. Parmi ces mesures figurent les candidatures indépendantes, mais aussi et surtout, il demeure que les Burkinabé ont eu une culture politique assez élevée, car ensemble, ils peuvent influer sur les systèmes politiques qui ne leur conviennent pas. Si toutefois la transition a eu des acquis, il demeure aussi que celle-ci n’avait pas de feuille de route pour gouverner, en témoigne le discours du premier ministre sur sa politique générale qui n’a jamais été fait devant le Conseil national de transition (CNT). Ce discours devait pourtant être la lettre de mission qui devait lui être accordée par le CNT pour poursuivre ses prérogatives. Et c’est ce manque qui a fait que la suite de la transition était devenue comme un tâtonnement, étant donné que n’importe quel sujet évoqué par les masses était devenu prioritaire.
La transition devait d’abord passer à une 5ème République...
En outre, le Dr Abdoul Karim Saïdou estime que la transition n’a pas été un modèle de bonne gouvernance, si l’on s’en tient au rapport de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat (ASCE), qui a relevé certaines choses pas catholiques. Par ailleurs, la transition, qui devait s’atteler au passage à une 5ème République, ne l’a pas fait alors que cela urgeait, pour garantir les acquis de l’insurrection d’octobre 2014 avec des textes contenant des valeurs cardinales dans lequel le peuple se reconnait. Il y a aussi eu des avant-projets de constitution, mais ceux-ci sont restés dans les tiroirs.
Ennemis hier, amis aujourd’hui...
Après donc les élections, le Dr Abdoul Karim Saïdou fait constater que les ennemis d’antan sont devenus des amis d’aujourd’hui. Il cite la recomposition actuelle de l’opposition politique burkinabé, où l’Union pour le progrès et le changement (UPC) et le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), ex parti majoritaire, se sont rejoints dans le même camp d’opposants.
Le pouvoir va par à-coups...
Concernant le régime actuel, le Dr Saïdou pense que sa volonté de passer à une 5ème République est suspecte et doit être surveillée de près, parce que rien ne prouve que ce passage à cette cinquième République soit meilleur à celle de la 4ème. Selon le Dr Saïdou, les tenants actuels du pouvoir inquiètent, quant au respect de la séparation des pouvoirs. Il cite notamment le cas Yacouba Isaac Zida, l’ancien premier ministre de la transition, et estime que s’il y a des choses contre celui-ci, il faut tout simplement engager des procédures judiciaires contre lui, au lieu de tergiverser. Les tenants du pouvoir actuel n’ont peut-être rien de mieux à proposer au peuple, d’où cette diversion se cantonnant sur la transition, au lieu de passer à l’essentiel que sont les questions de l’énergie, l’eau, l’éducation, entre autres, dit-il. Le Dr Abdoul Karim Saïdou estime de ce fait que le pouvoir va par à-coups, ce qui dénote que celui-ci n’a jusque-là pas bien perçu les aspirations des populations.
On ne développe pas, on se développe...
Il demeure donc important de faire un diagnostic de celles-ci, puisque dès lors, l’on assiste à des phénomènes d’incivisme. Il donne pour exemple rien que les feux tricolores, qui ne sont pas respectés et, il faut des gens pour siffler et monter que le feu est au vert ou au rouge... Des choses qui sont ridicules et qui ne devaient pas être, mais hélas ! Le Dr Saïdou pense que seuls les Africains doivent se développer, étant donné que l’on ne développe pas. Il ne s’agit pas d’immigrer pour un lendemain meilleur, mais que les peuples prennent les choses à bras le corps pour leur destinée, car les politiques sont souvent vides de sens, dès qu’il y a un changement en leur faveur.
Claire Lebœuf