Si le fait de communiquer davantage est une bonne chose en soi, surtout quand il permet aux premiers responsables du pays de s'exprimer sur des questions brûlantes de l'heure, il y a des limites, voire des règles de bon sens ou d'éthique de la communication qu'il faut savoir observer. Que Yacouba Isaac Zida explique le fonctionnement du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) aux députés du CNT, qu'il rappelle à ces derniers qu'une commission a été mise en place pour mener une réflexion sur le devenir de cette unité d'élites après la fuite de Blaise Compaoré, qu'il se permette même peut-être d'expliquer ou de justifier le choix du général Gilbert Diendéré comme président de cette commission, cela passe encore! Mais qu'il ose clamer devant l'hémicycle, ramant ainsi à contre-courant de ses propres promesses à l'orée de sa prise du pouvoir après l'insurrection, que le RSP ne doit pas être et ne sera pas dissous, émettant ainsi un avis défavorable à la probable dissolution de ce corps, avant même la livraison des résultats des travaux de la commission mise en place pour se pencher sur le sujet, cela est tout simplement maladroit, voire inélégant.
Dans le même ordre de principe, l'on ne trouverait rien à redire si Michel Kafando prend son bâton de pèlerin diplomatique pour expliquer à la communauté internationale le bien-fondé de l'adoption et de la promulgation du nouveau code électoral. Il a d'ailleurs impressionné, pour ne pas dire mystifié ou bluffé plus d'un politologue ou géo politologue, en étayant brillamment ses propos par des exemples inspirés des cas très à-propos tunisien et égyptien. Le mot de trop a été placé le jour où, en réponse à une question piège sur le cas précis de Roch Marc Christian Kaboré, probable candidat à l'élection présidentielle d'octobre prochain, il a osé donner son point de vue avec trop de précision.
Le président de la Transition ne doit pas prendre position sur une question qui doit être tranchée par le Conseil constitutionnel. Sinon, s'il y a coïncidence entre le point de vue qu'il a émis antérieurement et la décision du Conseil, il aura lui-même tendu des verges à ses détracteurs pour le fouetter sans le moindre ménagement. Il est donc évident que pour mener une saine communication dont elles tireront elles-mêmes le plus grand profit, les autorités de la Transition doivent, sinon se garder de, du moins prendre le moins de position possible sur des sujets sur lesquels des juridictions ou institutions indépendantes ont le dernier mot, ou sur lesquels des cadres de réflexion sont en train de travailler pour favoriser une prise de décision éclairée.
A défaut donc de se taire, elles peuvent au moins éviter de choisir un camp en attendant les propositions ou décisions des structures compétentes pour s'aligner derrière ces conclusions si elles ont respecté le droit et sont opportunes.
Les Echos du Faso