Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, a fait de l’instauration de la bonne gouvernance au Burkina postinsurrectionel, un combat personnel. Il a annoncé les couleurs dans son discours d’investiture, le 29 décembre 2016 à Ouagadougou, par un usage répété du terme « bonne gouvernance ». «Une exigence de probité et de bonne gouvernance dans tout ce que nous faisons, pour ne pas se servir du pays mais pour le servir de manière désintéressée. Que nous reconnaissions à l’Etat sa place et son rôle prépondérants dans la conduite des affaires publiques, son autorité, toute son autorité dans le fonctionnement harmonieux et régulier des institutions républicaines, afin de garantir une bonne gouvernance au profit de l’ensemble des citoyens », a déclaré, entre autres, le chef de l’Etat. Dès lors, lui son gouvernement et lui se sont mis à l’épreuve pour tirer au clair, la gestion du régime précédent. Trois semaines plus tard, le gouvernement émettait des doutes sur dix-huit marchés publics attribués au cours du dernier trimestre de la Transition. Ces marchés, financés aussi bien sur les ressources de l’Etat que sur des ressources extérieures, ont connu diverses procédures de passation à savoir, appel d’offres ouvert, appel d’offres ouvert accéléré, appel d’offres restreint et accéléré, appel d’offres ouvert international, appel d’offres international et entente directe. L’exécutif a alors décidé de mettre en place une commission interministérielle restreinte, conduite par le ministre en charge des finances, pour évaluer les conditions de passation de ces marchés, l’état d’avancement desdits marchés et la disponibilité des ressources pour leur exécution. La gestion de la Transition a encore donné lieu à des échanges au conseil des ministres du 9 mars dernier. Le gouvernement a évoqué, au cours de cette instance, des soupçons de blanchiment d’argent portant sur la somme d’environ 86 milliards de FCFA, sous la Transition. Aussi, a-t-il soumis le dossier au procureur en vue de l’engagement de poursuites judiciaires. Et les ministres concernés ont été instruits de suivre l’évolution du dossier dans le respect des procédures judiciaires.
S’il y a une affaire qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive, c’est celle relative à l’acquisition à polémique de parcelles par le Premier ministre de la Transition, Yacouba Isaac Zida. L’écho a été donné par certains journaux de la place qui ont mené des investigations manifestement concluantes. Le chef du gouvernement d’alors aurait acquis une parcelle, estimée à une valeur initiale de 300MILLIONS FCFA à une soixantaine de millions. Une sous-estimation suspecte, révélée par la presse, qui a obligé le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba, à demander au directeur général de la Société nationale d’aménagement des terrains urbains (SONATUR), Bali Traoré, de recouvrir auprès de la personne mise en cause, le manque à gagner du prix réel des parcelles acquises par son épouse et lui dans des conditions jugées non réglementaires. Le directeur général, Bali Traoré, va payer de sa «mauvaise» gestion.
La Haute cour de justice opérationnelle
A l’issue du Conseil des ministres du 16 mars 2016, c’est Claude Obin Tapsoba, un ingénieur topographe, qui prend sa place à la tête de la SONATUR.
La volonté du président Roch Marc Christian Kaboré d’instaurer la bonne gouvernance prend un ancrage institutionnel.
Les membres de la Haute cour de justice, juridiction réactivée sous la Transition, sont renouvelés et installés dans leurs fonctions. Selon la Constitution, cette juridiction est « compétente pour connaître des actes commis par le Président du Faso dans l’exercice de ses fonctions et constitutifs de haute trahison, d’attentat à la Constitution ou de détournement de deniers publics ». Conformément aux dispositions de la même loi fondamentale, elle est également habilitée à « juger les membres du gouvernement en raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ».
Le nouveau président de la Haute cour de justice, Mathieu B. Ouédraogo, s’est engagé à jouer pleinement son rôle en cas de besoin. « Nous allons dire le droit dans toute sa rigueur. Nous serons respectueux des délais, des procédures, des droits de la défense », a-t-il avancé lors de son installation. Au regard de ce qui précède, les nouvelles autorités du pays semblent attachées à la gouvernance vertueuse.
Pour donner l’exemple, elles ont pris des mesures visant la réduction du train de vie de l’Etat. Ils s’agit, entre autres, de l’annulation de commande de véhicules par le parc de l’Etat, des initiatives pour minimiser les baux administratifs, du plafonnement des frais de communication téléphonique des plus hautes autoriés.
Elles disposent de cinq ans, le temps du mandat présidentiel, pour assainir et montrer aux yeux des Burkinabè, qu’elles sont réellement là pour servir le pays de manière désintéressée. Car, on se rappelle que c’est en partie cette soif de bonne gouvernance qui a conduit les Burkinabè dans la rue pour chasser le régime Compaoré.
Adama SEDGO