La disparition de ces personnalités a profondément bouleversé les Burkinabè qui restent marqués dans leurs esprits. Chose curieuse, c'est dans ce contexte de deuil national que le président du Faso (PF), Blaise Compaoré, a trouvé le moyen de se permettre des bains foule lors de son déplacement à Pô, le vendredi 3 octobre, pour la cérémonie de sortie de promotion des élèves de l'Académie militaire Georges Namoano. Il était accompagné par son homologue togolais, Faure Essomzina Gnassingbé.
Les Chefs d'Etats du Burkina et de Togo, sur la route de leur déplacement, ont fait des escales à Kombissiri et Nobéré pour prendre des bains de foule ainsi qu'à Pô. Les images ont été passées en boucle sur la télévision nationale au cours du journal télévisé de 20h. «Blaise Compaoré et Faure Gnassingbé ont marqué des arrêts à Kombissiri et Nobéré pour de brefs instants de communion avec les populations. Brèves escales pour saluer les autorités coutumières et politiques dans une ambition survoltée des habitants de ces localités qui ont témoigné leurs reconnaissances et leur gratitude au Président du Faso. A Pô, une longue haie humaine a communié avec le Chef de l'Etat, l'obligeant à descendre de voiture, parfois, pour serrer quelques mains dans un délire total. Cette nouvelle occasion a permis aux populations et à leur président de se parler à demi-mots, d'échanger des regards et d'envisager l'avenir avec sérénité» a témoigné le reporter de la télévision nationale, Godefroy Bazié, dans son commentaire.
Ceci dit, avait-on vraiment besoin d'un tel spectacle fortement médiatisé dans une situation de ''deuil''? Certes, les bains de foule ne sont pas interdits. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois que le PF s'est lancé dans un tel exercice qui n'est pas, faut-il le reconnaître, monnaie courante en dehors des périodes proches des élections.
On se souvient récemment de ses tournées aux allures de précampagne pour le référendum à Fada, Zorgho, Réo, Koudougou, etc. Et, de nos jours, on sait que «l'homme fort du Faso» en a réellement besoin de s'offrir un bol d'air avec les échanges surchauffés du dialogue politique qui se déroulent sous son toit, au palais présidentiel de Kosyam. Cela est compréhensible.
Ce qui ne l'est pas, en revanche, c'est l'opportunité de ses récents bains de foule le long du trajet le conduisant à Pô. Le contexte national marqué par des deuils ne s'y prêtait pas. Ne pouvait-il pas attendre ou même reporter, encore une fois de plus (contexte national oblige), la cérémonie? Et même si ce n'était pas possible (calendriers des deux hommes obligent), il fallait faire l'économie de ces bains de foule médiatisés.
Pendant que nombre de ses compatriotes étaient dans la douleur, il aurait dû compatir. Si c'était une première.
Comme par hasard, lorsque la Nation est éprouvée, lui, il a d'autres chats à fouetter. S'il ne se terre pas dans un mutisme incompréhensible entre les quatre murs de son palais, il va respirer l'air ailleurs. Il faut se souvenir que le jour des obsèques du président Saye Zerbo, Blaise Compaoré a pris son avion pour fendre les airs et se retrouver à Bamako, à l'investiture du président malien, et poursuivre sa route à l'Assemblée générale des Nations unies à New York, alors que, comme cette année, son ministre des Affaires étrangères pouvait l'y représenter. On ne lui demande pas d'aller verser des larmes de crocodile, comme IBK l'a fait aux décès de nos confrères de RFI, mais il aurait pu ''faire semblant'' de compatir à la douleur des familles éplorées. Elles ont droit à ce témoignage pour ce que leurs proches, aujourd'hui disparus, ont rendu des services à la république.
Il a fallu le décès d'Arba Diallo pour savoir qu'il n'avait même pas reçu de reconnaissance digne de ce qu'il a fait pour son pays. A l'opposé, même un bleu, lorsqu'il entre au gouvernement pour 24 heures, est bombardé Officier de l'Ordre national pour des services qu'il n'a même pas encore rendus...