Face à la grongne populaire nationale et internationale contre cette suspension, le président Michel Kafando est revenu sur la mesure en fin d'année. Non sans mise en garde au cas où ces partis mèneraient des activités de déstabilisation de la transition. Une mesure qui a permis à ces partis et à ces dirigeants de réapparaître non seulement dans la vie quotidienne, mais également sur le terrain politique. Gilbert Noël Ouédraogo, président de l'ADF/RDA fait le tour du Faso à la rencontre des chefs coutumiers et religieux pour implorer le pardon. Dans certaines contrées, il est accueilli en « héros ». Quand le CDP a repris ses rencontres politiques, sous la responsabilité d'un directoire dirigé par Léonce Koné, les militants et militantes ne se font pas prier pour rejoindre les rangs. Comme s'ils n'attendaient que cela.
Entretemps est entré en jeu le vote des Burkinabè de l'extérieur. Alors qu'il a longtemps été réclamé par les partis de l'opposition et les organisations de défense des droits de l'Homme (dont les organisations de la société civile), ce sont les mêmes, avec le soutien de la CENI qui estiment que les conditions techniques et matérielles ne sont pas réunies pour les élections de 2015. Malgré les protestations de la diaspora burkinabè, de certaines formations politiques et organisations de la société civile, on a « écarté » les Burkinabè de l'extérieur. Malgré tout, l'ancien système semble résister. Il faut donc aller à la vitesse supérieure.
Le gouvernement concocte un Code électoral. Le CNT le complète. Des Burkinabè ont ainsi décidé d'exclure des prochaines élections d'autres Burkinabè. De l'extérieur dans un premier temps, puis de l'intérieur dans un second temps. De l'extérieur, ce sont des millions de Burkinabè qui doivent attendre une prochaine fois pour exprimer leur devoir de citoyen. De l'intérieur, ce sont aussi des milliers qui, par le fait qu'on a exclu leurs leaders, devront attendre une prochaine fois pour exprimer leur vote.
Ce qui est inquiétant, c'est comment réconcilier les Burkinabè dans un contexte de ce genre ? Alors qu'une Commission nationale de réconciliation et des réformes a été créée. Veut-on réellement aller à la réconciliation ? Veut-on vraiment la paix et un avenir serein pour ce pays ? Ces questions méritent d'être posées dans la mesure où partout où il y a eu de l'exclusion, on a créé de forts antagonismes dont la finalité a été l'affrontement, la remise en cause de la paix et de la stabilité. Le Burkina Faso n'a pas besoin de ça.
Dabaoué Audrianne KANI