C’est une allocution historique d’environ une douzaine de minutes qu’a livrée le président Kafando aux députés de la transition, ce mardi 27 octobre 2015. Moment historique de la vie du parlement burkinabè, 85 députés étaient présents à cette plénière. Au terme de la brève introduction, faite par le chef du parlement, Chériff Sy, pour justifier le contexte de cette allocution, place est faite au chef de l’Etat qui rejoint la tribune, sous les acclamations des députés.
Hommages mérités
«En entrant ce matin, dans cette enceinte, dans ce prestigieux temple des lois, je suis pris d’un léger frémissement, à l’idée que c’est ici que s’élaborent et se prennent les grandes décisions qui, avec celles du gouvernement, donnent corps, vie et légitimité à la transition», annonce d’emblée, Michel Kafando, pour saluer le travail abattu par cette chambre législative qui l’accueille pour cette adresse. Aux détracteurs du parlement transitoire, le chef de l’Etat est sans équivoque. Selon lui, il n’y a pas plus légitime que le CNT, parce qu’il est l’émanation directe et spontanée de la volonté populaire, telle qu’elle s’est exprimée les 30 et 31 octobre 2014. «Onction du peuple, vous êtes la quintessence même de la représentation nationale et c’est en cette qualité que, Président de la transition, je viens vous saluer et surtout, vous rendre un vibrant hommage», ajoute le président Kafando. A ses yeux, cette adresse, qui intervient à quelques mois de la fin de la transition, se veut aussi, être un témoignage de gratitude à tous les membres du CNT et principalement, à celui qui l’incarne au sommet, le président Moumina Chériff Sy qui a joué un «rôle éminent, lors du plus ignoble attentat à la liberté du peuple burkinabè, le 16 septembre 2015».
Des regrets
Dans la suite de son intervention, le président du Faso, exprimera cependant, quelques regrets dont le plus significatif est le faux bond enregistré dans le passage à la Ve République, afin de bâtir définitivement, une démocratie forte, débarrassée des velléités de confiscation du pouvoir. «Là où nous ressentons ensemble, de l’inconfort, c’est de n’avoir pas pu passer à la Ve République car, me semble-t-il, une telle exigence s’imposait bel et bien, comme une obligation incombant à la transition», note le président de la transition. A son avis, faire des élections qui débouchent sur de nouvelles institutions suppose que celles-ci aient pour socle, une nouvelle république. Par ailleurs, ajoute-il confiant, parmi les priorités du nouveau pouvoir, celle-ci devrait par conséquent, figurer au premier rang.
De la réconciliation des cœurs
Pour apurer le lourd passif des manquements et des violations tous azimuts, dont le peuple burkinabè a été victime, le président a exhorté le parlement transitoire à faire preuve de diligence dans l’adoption des pertinentes recommandations de la Commission de réconciliation nationale et des réformes, permettant d’apurer le passif et de parvenir, après justice rendue, à une réconciliation vraie, stable et pérenne des filles et fils de ce pays. Pour ce sacrifice, il encourage les membres du CNT à braver les dangers. «Soyez des Hercule de la liberté qui ne reculent devant aucun sacrifice pour donner au gouvernement, les prérogatives nécessaires, afin que ses décisions soient respectées et que l’exécutif lui-même ressente la coercition du contrôle, par vous, de ses activités», a-t-il conclu, avant de louer la Providence pour sa main tendue sur la patrie des hommes intègres.
Larissa KABORE
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Appréciations de parlementaires
Chériff Sy, président du CNT : « Les enquêtes parlementaires vont continuer »
Je pense que le président a rendu un vibrant hommage à cette composante de la transition qu’est le CNT pour le travail abattu, en quelques mois et pour le reste du travail à venir. Il a magnifié sa résistance à la tentative de putsch et je pense que c’est une adresse qu’il fait à la nation burkinabè, pour qu’elle se réconcilie avec elle-même, parce que d’une manière magistrale, elle a su mettre fin à la forfaiture à laquelle nous avons assisté, en septembre. Les députés étant l’émanation du peuple, en leur soulignant cela, je pense qu’il rend grâce à ce peuple magnifique. Il rend aussi grâce à Dieu, d’avoir béni ce peuple. Concernant les enquêtes parlementaires, il y a déjà un travail qui est en train de se faire. Il y a beaucoup d’argent qui est recouvert et le travail va continuer. Mais, je dois vous dire que le plus important dans cet exercice, c’est la pédagogie que cela dégage et qui va impacter forcément la suite de notre gouvernance financière et économique. Je pense qu’il va être difficile de pouvoir faire certaines choses dans ce pays qui ne correspondent pas à la loi ou qui ne correspondent pas à l’aspiration de notre peuple. Vous pouvez faire confiance à cette jeunesse dynamique que nous avons vue. Vous pouvez faire confiance à ces femmes et à ces hommes qui se sont battus pour leur dignité et leur intégrité et qui n’accepteront pas certaines formes de mal gouvernance. Donc, je ne doute pas que ce qui reste à recouvrer sera recouvré.
Yaya Karambiré, député OSC : « Ce discours nous va droit au cœur »
Nous nous réjouissons de la visite du président du Faso, ce matin, parce que dans l'histoire parlementaire, c'est la première fois que cela arrive. Et les mots qu'il a adressés à l'endroit de la représentation nationale nous vont droit au cœur et cela témoigne effectivement, du travail que nous avons abattu, depuis notre installation. Par rapport à cela, nous ne pouvons que dire merci au président du Faso de la marque d'attention à l'endroit des députés de la transition.
Mamadou Traoré, député OSC, sensibilité handicap :《Ce fut un discours mémorable 》
Je pense que le Président du Faso a fait un discours mémorable que nous apprécions à juste titre et nous sommes très fiers qu'il ait reconnu le travail que nous abattons, au sein de l'hémicycle. En tous les cas, nous sommes très satisfaits. Nous nous acheminons vers la fin de la transition et le temps qui nous reste ne nous permet plus de faire des projets, mais nous sommes satisfaits de ce qui a déjà été fait, et espérons une pérennisation des acquis.
Kontogome Robert, président de la Commission enquête parlementaire : 《Ce discours démontre l'importance du CNT au Burkina Faso 》
La visite du président du Faso au Conseil national de la transition est exceptionnelle. Comme on le dit, dans la vie d'une nation, il y a des jours très importants et le fait que, durant la transition, le président accepte de venir s'adresser aux représentants du peuple est une chose à saluer vraiment. Cela nous réconforte davantage dans nos prises de décision. Et par rapport à ce que le président a dit, j'ai retenu 2 phrases très essentielles. Il s'agit des phrases :《un peuple qui est uni est invincible 》et 《il met en déroute tous les imposteurs du monde》. Cela est une réalité que nous avons vécue avec le putsch manqué. Aussi, il est revenu sur la contribution du CNT à l'ancrage démocratique et à la mobilisation des recettes. Par ailleurs, il a apprécié le rapport de la commission d'enquête parlementaire et moi, en tant que président de cette commission, cela me donne plus de force et de courage pour mes fonctions futures, et cela démontre également, l'importance du CNT au Burkina Faso.
Konseibo/Kabré Andréas, député :《On s'est battu pour que le processus de transition puisse continuer et le président l’a reconnu》
C'est la première fois au Burkina Faso et on est vraiment contents, du fait que le président ait pu faire le déplacement. Nous sommes vraiment satisfaits et contents. Il a fait un discours qui a vraiment apprécié l'action que nous avons eu à faire au sein de l'hémicycle et cela est encourageant. Il a évoqué la résistance au putsch du 16 septembre et n'a pas manqué de féliciter le président du CNT. Ensemble, on s'est battus pour que le processus de transition puisse continuer et on est rassurés que le président ait reconnu cela.
Fernand Sanou, 3e vice-président du CNT :《La légitimité ne sort pas que des urnes》
Le président du Faso a surtout salué la mobilisation de ces gens dont la légitimité avait été un peu contestée par certaines personnes, disant que la légitimité ne sort que des urnes, alors que quand un peuple est mobilisé et désigne des gens pour traduire ses aspirations, c'est là qu'il y a la vraie légitimité. Cela nous a réconfortés de voir que le président a insisté sur cela. Il a aussi salué la mobilisation de ce peuple pour défendre ses intérêts et faire en sorte que le Burkina Faso ne connaisse plus de dérives. Et nous ne pouvons que le remercier de ses encouragements et appréciations des députés et du peuple burkinabè, en général.