Au Bureau de l’Assemblée nationale ivoirienne : j’exhorte au retrait des exigences et injonction à l’endroit de l’institution judiciaire burkinabè

| 25.01.2016
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Au Bureau de l’Assemblée nationale ivoirienne : j’exhorte au retrait des exigences et injonction à l’endroit de l’institution judiciaire burkinabè
© DR / Autre Presse
Au Bureau de l’Assemblée nationale ivoirienne : j’exhorte au retrait des exigences et injonction à l’endroit de l’institution judiciaire burkinabè
Il fallait certainement un député tenace et non-conformiste pour porter un amendement ultime au projet de déclaration du Bureau de l’Assemblée nationale avant publication... Sans doute, il aurait pour tâche lourde de convaincre ses collègues pour accepter que le terme « exigence » formulé à l’endroit d’une juridiction d’un pays tiers ne sied pas dans le cas présent et qu’il pourrait donner d’ailleurs la connotation d’un syndicalisme au plus haut sommet de l’Etat en pareille circonstance...


D’aucuns diront : qui est-il cet Inconnu pour faire des exhortations à l’endroit de l’institution parlementaire ivoirienne ? En réponse, je suis défenseur de la démocratie et de l’Etat de droit et prévenant sur les risques de dérapage d’une affaire pernicieuse susceptible d’affecter négativement les communautés paisibles ivoiriennes et burkinabè.

Bien avant cette question, d’autres plus importantes et urgentes, mériteraient d’être posées : quelle prérogative le parlement ivoirien a-t-il sur la justice nationale ivoirienne, à fortiori, l’institution judiciaire d’un pays voisin, précisément le Burkina Faso ? Le Bureau de l’Assemblée est-il réellement dans son rôle ici ? Par cette sortie, ne se discrédite t-il pas lui-même dans sa volonté de s’en tenir fermement à la séparation constitutionnelle des pouvoirs entre le législatif et le judiciaire, - disposition donnant tout son sens à la démocratie vue idéalement par le doyen Montesquieu ? Ne met-il pas de l’eau au moulin de ceux qui accusent l’autorité judiciaire ivoirienne de pratiquer la justice des vainqueurs ou de deux poids, deux mesures ? Les parlementaires ivoiriens ne sapent-ils pas eux-mêmes l’effort d’approches diplomatiques envisagées par Son Excellence Monsieur le Président de la République, Alassane Ouattara ? Laissent-ils entendre l’écoute préalable nécessaire par eux-mêmes des enregistrements sonores mis en cause dans cette affaire scabreuse ? Si oui, la quête de la vérité présente-elle un intérêt particulier pour eux ? N’est-il pas superficiel de balayer du revers de la main, les conclusions d’une juridiction nationale pour la mettre au compte d’acharnement politico-judiciaire ? Est-il si banal technologiquement, de pré-fabriquer des écoutes téléphoniques ? Si telle est le cas, un exemple de pré-fabrication en guise de démonstration ne serait-il pas plus pédagogique à l’intention de l’opinion publique internationale ? L’immunité parlementaire ivoirienne met-elle inconditionnellement le député ivoirien à l’abri de toute poursuite judiciaire au delà des frontières nationales, que ce soit en France, aux Etats-Unis d’Amérique, en Russie ou au Burkina Faso ? Au-delà des relations diplomatiques entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, quel message démocratique le Bureau de l’Assemblée nationale ivoirienne entend-elle diffuser de par sa déclaration ? Quel est le message sous-jacent de cette déclaration ? Que dit l’opposition ivoirienne dans cette affaire ?

N’est-il pas plus opérant pour les députés ivoiriens d’EXIGER DES COMPTES à Son Excellence Kigbafori Guillaume Soro, au besoin, de l’inviter à prendre des dispositions idoines dans l’organisation sereine de sa défense afin d’éviter toute corrosion de l’image honorable de l’institution parlementaire ivoirienne et de préserver la paix et plus de sérénité entre les deux pays ? Doit-on s’en tenir à observer Son Excellence Kigbafori Guillaume Soro comme un agneau jouissant d’une virginité politique irréprochable à tout point de vue ? Aussi, les parlementaires n’ont-ils cure des prises de positions publiques partisanes dignes d’ingérence de Son Excellence Kigbafori Guillaume Soro dans les derniers mois du règne du Burkinabè Blaise Compaoré et après le départ de ce dernier ?

Pourquoi dans une affaire concernant un citoyen – soit-il le Président de l’Assemblée nationale -, les députés dans leurs déclarations, semblent-ils brandir les Peuples respectables pacifiques de Côte d’Ivoire et du Burkina Faso ? A l’instar de la posture de députés ivoiriens, les guinéens devraient-ils déjà commencer à faire le décompte des citoyens Américains sur leur territoire en perspective de représailles, au motif que le Général SEKOUBA KONATE – ancien Président de la Transition - est épinglé pour une supposée fraude financière aux USA ?

Il faut le dire net ! L’attitude banale qui consiste à toujours lier les communautés innocentes aux faits, gestes et travers de quelconque compatriote, relève plus d’un réflexe moins honorable. L’honorable député qui a tout un parcours citoyen respectable à son compte, a le devoir de s’élever au dessus de considérations banales des choses. C’est donc avec stupéfaction que de par la déclaration du Bureau de l’Assemblée nationale, en des termes à peine feutrés, que des députés s’érigent volontairement ou involontairement à l’avant-garde d’une telle posture communautariste...

En tant qu’analyste averti, je voudrais attirer l’attention de députés ivoiriens sur un fait devenu aujourd’hui un lieu commun : beaucoup pensent bien souvent que le Burkina Faso devra être le plus grand perdant dans une éventuelle tension diplomatique avec la Côte d’Ivoire, du fait de la présence d’une forte communauté Burkinabè dans ce pays voisin au destin partagé. C’est une très grave erreur d’appréciation, tant la pénétration des ces communautés est profondément ancrée par le fait de l’Histoire, plus particulièrement en Côte d’Ivoire. Les paradigmes doivent désormais être inversés pour cerner les choses avec juste mesure...

Les députés rendront un énorme service à la Côte d’Ivoire, à leurs Excellences Alassane Ouattara, et Kigbafori Guillaume Soro lui-même, à nos Peuples interpénétrés, en ne sombrant pas dans une solidarité inconditionnelle, au mépris de l’égalité de tous devant la loi, de la nécessaire prise de responsabilité de chacun face à ses propres actes visibles ou clandestins, avérés, supposés ou non. En effet, dans pareille circonstance, la tentation est grande, sinon très grande, de sacrifier la vie paisible des Peuples et des nations, sur l’intérêt politicien. Il semble de ce fait opportun de rappeler cette pensée utile à la méditation : les plus grandes déceptions, trahisons, émanent souvent aussi des personnes auxquelles l’on croit le plus, que l’on admire le plus, auxquelles l’on doit le plus.

Il n’y a pas de doute sur ce point ! Cette affaire mérite bien la qualification « politico-judiciaire ». Cependant, ce n’est certainement pas parce que l’institution judiciaire burkinabè la veut comme telle, mais plutôt, eu égard non seulement à la nature des charges mises en avant, notamment la déstabilisation de l’Etat (politique), mais aussi au statut d’homme politique du Citoyen mis en cause et de surcroît, Président de la prestigieuse Assemblée nationale ivoirienne...

Mettons donc les communautés hors de cette affaire judiciaire concernant un Citoyen pour l’intérêt de tous ! Arrêtons, sinon faisons l’effort de circonscrire sa politisation communautariste !

Lien utile :

Idrissa Diarra
Géographe & politologue.
S.E. du Mouvement de la Génération
Consciente du Faso (MGC/Faso).
Institut Martin Luther King d'Etudes politiques
(IEP-ML King)
Mobile : (+226) 66 95 04 90
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Ouagadougou, le 22 janvier 2016.

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