Imprimer cette page

Notre histoire : La democratie à l'epoque imperiale

| 16.01.2014
Réagir
Le Mogho Naba, empereur des Mossi (Burkina Faso), photo prise avant 1940
© DR / Autre Presse
Le Mogho Naba, empereur des Mossi (Burkina Faso), photo prise avant 1940
L'historiographie occidentale, dit en parlant de la traite négrière européenne, que ce sont des roitelets africains et des chefs de villages qui ont vendu les leurs aux négriers. C'est contre cet argument que l'historien camerounais Bwemba Bong rapporte les écrits de l'historien burkinabé Joseph Ki-Zerbo. Ce dernier parle en détail de la vitalité de la démocratie en Afrique noire à la veille de la traite négrière européenne. Ceci permet de montrer que les « chefs » n'avaient pas la possibilité de décider selon leur bon vouloir du devenir de leur peuple, car ils étaient soumis à un strict système de control.

Avant cela, il faut dire que « l'Afrique couverte de petits villages » est un gros mythe. Voici quelques superficies : Empire Songhaï 3 millions de Km², Empire Kongo 2 millions de Km², Mwana Mutapa (Monomotapa) entre 700 000 et 2 millions de Km². Kongo dia Ntotila seul était donc aussi grand que les 5 pays les plus puissants d'Europe réunis. La richesse inouïe de ces empires et royaumes était connue jusqu'à Bagdad, on en faisait même des dictons en orient. Il est donc incongru de qualifier l'Askia du Songhaï, le Mwene Kongo ou le Mwene Mutapa de « chef de village ». C'était des empereurs ! Les mêmes qui disent que l'Afrique était couverte de villages appellent la Belgique, 30 000 km², un royaume. Allez comprendre.

Joseph Ki-Zerbo nous dit ceci « Le pouvoir en Afrique était largement partagé entre différents groupes qui entouraient le chef ou le roi. On faisait comprendre au roi, avant d'être investi, qu'il devait régner au profit du peuple. Le roi, dans la plupart des cas, prononçait des serments et s'engageait solennellement, au nom de ses ancêtres, à travailler pour la population et à ne pas commettre des abus, des actes de vols, de détournement de femmes etc. Un contrat liant le roi et sa population par un engagement réciproque était souvent conclu, par exemple en pays ashanti.

Le roi lui-même était sous la surveillance d'un certain nombre de pouvoir partiel, par exemple ses conseillers ou les griots. Ainsi dans le système des royaumes Yoruba du Benin, les grands conseillers du roi avaient le pouvoir de sanctionner. Quand ils voyaient que le roi avait fauté ou qu'il se comportait de façon autocratique, ils lui envoyaient des oufs de perruche pour lui donner l'ordre de se suicider. Les griots de leur côté exprimaient au roi les idées et les critiques de la population. Ces critiques ne pouvaient pas être formulées par n'importe qui ; seuls les griots avaient le droit, traditionnellement, de s'exprimer avec beaucoup de liberté devant le roi. Ces propos prenaient la forme de proverbes ou de contes qui laissaient entendre clairement que le roi était visé, mais en évitant de lui faire perdre la face devant toute l'assistance. Elles devaient être prises au sérieux, tout le monde comprenait ce qui avait été dit. Même si ce n'est pas à travers des commentaires injurieux à l'égard du roi, tous les adultes comprenaient et prenaient acte.

Toute une panoplie de rituels mettait en garde le roi et lui montrait qu'il devait exercer ses fonctions en toute responsabilité. D'ailleurs chez les Mossi, le candidat à la chefferie se présentait devant le plus simple appareil pour qu'il ne soit désigné ou investi. Il portait un petit pantalon, avait le buste nu et son corps était couvert d'une peau de mouton. Cela signifiait qu'au départ, le roi était dépouillé de tout ; il arrivait sans rien au pouvoir et devait se comportait sans s'enrichir sur le dos de ses sujets. Le roi devait être soumis aux devoirs et aux contraintes de son nouvel état ; ses obligations lui étaient rappelés à chaque grande cérémonie ou « salutation » ».

Si l'Occident a fait beaucoup de progrès en termes de démocratisation, il faut dire qu'à l'époque où le gouvernement appartenait au peuple en Afrique noire, l'Europe avait beaucoup de monarchies dictatoriales.
Hotep !

African History-Histoire Africaine

Publicité Publicité

Commentaires

Publicité Publicité