Il est vrai que ce scrutin intervenait après une longue période d'instabilité faite de coups d'Etat et d'assassinats à répétition, les deux derniers en date étant l'attentat à la bombe en 2009 contre le chef d'état-major Tagmé Na Waïe suivi de la mise à mort, en guise de représailles, du président Joao Bernardo Vieira. L'instabilité chronique avait pris une telle ampleur qu'on se demandait quand le pays sortirait enfin de l'œil du cyclone.
Après cette consultation, somme toute réussie, il faut croire que le pays d'Amilcar Cabral est sur la bonne voie. Mais qu'on ne s'y trompe pas, c'est un grand malade encore convalescent qui a besoin de soins constant et appropriés pour se remettre d'aplomb.
De sorte que pour le président fraîchement élu la bataille électorale n'aura été qu'un jeu d'enfant comparée aux véritables exploits que les Bissau- Guinéens attendent désormais de lui ; car tout reste encore à faire pour celui à qui ils ont accordé toute leur confiance.
D'abord, la lutte contre le trafic de stupéfiants, quand on sait que la Guinée Bissau a acquis la réputation peu enviable de plaque tournante de cette activité criminelle en Afrique de l'Ouest. Une infection qui a fini par gangréner tout le corps social et même, pour ne pas dire surtout, les forces de l'ordre, d'où des difficultés énormes pour qui voudrait combattre le fléau.
Deuxième défi et non des moindres, la réforme d'une armée pléthorique hantée par les fantômes de la guerre d'indépendance et traversée par des clivages ethniques ; un défi d'autant plus grand que jusque-là ceux qui s'y sont frottés s'y sont piqués, alors que sans une armée digne de ce nom, pas de stabilité possible. Ainsi, la vielle dame aux colères mémorables devra, vaille que vaille, se muer en institution républicaine.
Que dire alors des nombreux problèmes socioéconomiques qui assaillent quotidiennement les ménages bissau-guinéens ? Autant de questions très vitales dont les réponses ont sans cesse été différées pour cause d'instabilité chronique.
Pour toutes ces raisons, le nouveau président risque fort de ne pas chômer.
H. Marie Ouédraogo