Délestages : Que le gouvernement respecte ses engagements envers la Sonabel

| 29.05.2015
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Délestages : Que le gouvernement respecte ses engagements envers la Sonabel
© DR / Autre Presse
Délestages : Que le gouvernement respecte ses engagements envers la Sonabel
La Sonabel est en crise. Conséquence: les citoyens sont contraints de subir de longs et interminables délestages d'électricité. La situation ne semble pas préoccuper les autorités de la Transition. Travaillent-elles à ce que les Burkinabè regrettent le départ de Blaise Compaoré?


Après près de 12 heures de délestage, un citoyen, las d'attendre l'électricité, compose le numéro vert de la Sonabel pour comprendre. Son interlocuteur ne passe pas par quatre chemins pour lui signifier que la situation les dépasse. «La Sonabel n'a pas d'argent pour acheter le carburant afin d'alimenter les groupes électrogènes dont certains sont en arrêt», a-il lancé. Surprise chez ce citoyen, qui ne comprend pas que sous la Transition, où «plus rien ne sera plus comme avant», la Sonabel connaisse des problèmes de trésorerie. «Ne me faites pas regretter Blaise Compaoré», a-t-il répondu à son interlocuteur au bout du fil. Pourquoi cette situation?

Selon une source interne, les responsabilités sont partagées. La quantité d'énergie disponible au Burkina Faso ne dépasse pas 150 mégawatts (MW). Pourtant, sur le papier, cette puissance serait d'environ 250 MW. C'est dire que le déficit entre ce qui devait être et ce qui est réellement disponible est de 40%, soit 100 MW.

Une première raison qui explique cette triste réalité est liée à la vétusté des installations sur les groupes électrogènes, entraînant des pannes à répétition. Les pièces de ces groupes n'étant pas disponibles sur le marché, leur acquisition rallonge les temps d'arrêt de ces groupes. Cette situation était d'actualité sous le régime Compaoré.

Aussi, on sait que ces groupes fonctionnent avec du carburant. Depuis 2011, les prix des hydrocarbures sur le marché mondial ont connu une hausse. Cela s'est répercuté sur la facture de la Sonabel. La ligne budgétaire «consommation de carburant» a explosé depuis cette période.

Pour permettre à la société de faire face à ces difficultés externes qu'elle-même ne peut maîtriser, l'Etat s'est engagé à la subventionner. Pour l'année 2013, il a été annoncé une subvention de près de 12 milliards de francs CFA. Moins de 5 milliards de francs CFA sont parvenus dans les caisses de la société. En 2014 et 2015, une subvention d'environ 35 milliards de francs CFA a été promise. Jusqu'au 1er mai 2015, aucun kopeck n'était parvenu à la Sonabel. En termes plus simples, sur près de 45 milliards de francs CFA de promesse de subvention entre 2013 et 2015, la Sonabel n'a reçu que moins de 5 milliards de francs CFA. Comment peut-elle faire face à ses charges dans la mesure où le prix de vente de l'électricité n'arrive pas à couvrir l'entretien des groupes, à plus forte raison honorer les factures de carburant?
Sans ces subventions, la Sonabel a pourtant continué de s'approvisionner auprès de la Sonabhy, mais à crédit. A un certain moment, la Sonabhy a exigé de la Sonabel le paiement de ces arriérés -plus de 40 milliards de francs CFA- et le paiement au comptant du carburant avant d'être servie. L'argent n'étant pas disponible, la Sonabel se ravitaille auprès de la Sonabhy à la citerne près.

Il est évident que la responsabilité de l'Etat est engagée dans cette situation. Le minimum est de respecter ses engagements et exiger une bonne gestion des fonds alloués. La Sonabel avait demandé l'augmentation du prix de l'électricité resté stable depuis 2006, mais le dernier gouvernement Compaoré, après avoir mesuré la possibilité de son rejet par les citoyens, s'était abstenu. Aucune autre mesure n'a été prise afin de permettre à la société de continuer de s'approvisionner en carburant et même constituer des stocks tout en maintenant le prix de l'électricité au même prix.

Malgré ce tableau noir, la situation de la Sonabel ne semble pas préoccuper le gouvernement de Transition plus que ça. Alors les supputations prennent le dessus, comme s'il y avait du sabotage en l'air. La semaine dernière, des travailleurs de la Sonabel ont été contraints d'alerter des responsables de médias sur l'arrêt de 5 groupes faute de carburant au moment où la ligne d'interconnexion avec la Côte d'Ivoire venait de connaître une rupture de câble.

Le Burkina Faso ne peut pas compter sur l'interconnexion avec la Côte d'Ivoire pour résorber le déficit, parce que ce pays lui-même connaît des difficultés et n'arrive pas à honorer ces engagements. Les pluies qui traînent à tomber contribuent à ce déficit, parce que faute d'eau, les barrages de Bagré et de la Kompienga n'arrivent pas à produire une quantité suffisante d'énergie hydroélectrique. Le plus urgent serait de ravitailler les groupes électrogènes en carburant.

Combien ces délestages font perdre à l'économie burkinabé? L'électricité est un facteur de production. Les administrations publiques et privées fonctionnent grâce à l'électricité. Les délestages retardent le traitement de nombreux dossiers. Les administrations qui se procurent des groupes électrogènes dépensent pour le faire et sont obligées de payer le carburant pour leur fonctionnement, sans compter la maintenance. Des dépenses supplémentaires dans leur budget.

L'électricité fait vivre de nombreuses petites entreprises indispensables pour notre quotidien. En dehors des services qu'elles rendent aux citoyens, ces petites entreprises paient des impôts et des taxes. Sans activité, il leur sera difficile de s'acquitter de ces impôts et taxes cette année. C'est le budget de l'Etat qui va en prendre un coup. Qui peut imaginer les conditions dans lesquelles les journaux sont produits à cause de ces délestages? A cause de ces mêmes délestages, de nombreux élèves échoueront à leur examen pour n'avoir pas pu réviser leurs leçons.

La Transition qui sait où trouver de l'argent pour organiser le 11-Décembre, distribuer des marchés publics et financer les projets de femmes, ne peut-elle subventionner la Sonabel, société d'Etat, pour faire face à ses difficultés?

Djénéba Sangaré

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