Afin de recueillir les avis des agriculteurs sur l'état d'avancement de la saison qui s'est tardivement installée, nous avons fait le tour de quelques champs, le 8 juillet 2014. Dans les champs visités, trois catégories d'agriculteurs se distinguent. Ainsi, Laurent Sanou, infléchi dans son champ de maïs, siffle de joie ou juste par habitude, en enlevant de la main gauche les mauvaises herbes. Vert, son champ laisse présager une bonne récolte. Mais, l'homme n'est pas satisfait comme il se doit. « L'année dernière, à cette période, je vendais déjà du maïs frais. Mais, cette année, la pluie s'est tardivement installée », a-t-il dit avec un air soucieux. Toutefois, il est confiant. « Si la pluie s'installe correctement dans ce mois de juillet, je pense que ce que la nature nous a réservé nous reviendra », a-t-il espéré.
Mais, toujours est-il que la situation de Laurent Sanou est enviée par son voisin, Urbain Sanou. Celui-ci et sa femme travaillent sur un terrain nu. Contrairement à Laurent, Urbain et sa femme sarclent leur terrain en vue d'y semer des graines dans l'espoir qu'elles poussent, avec la rareté des pluies qu'il pointe du doigt. « Vraiment, cette année, on ne sait que dire. L'année dernière, ce n'était pas comme ça. Mais, cette année, nous devons nous inquiéter », s'est-il inquiété avec un regard anxieux. L'inquiétude d'Urbain est due au fait que la pluie soit mal repartie dans le temps et dans l'espace. « Je ne comprend pas que dans la même ville, au moment où les habitants d'un côté ont du mal à vaquer à leurs occupations du fait de trop de pluie, ceux de l'autre bout sont baignés dans la poussière », a-t-il déploré tout en espérant que si dans ce mois, la pluie reprend son rythme normal, il serait possible de rattraper le retard.
Paradoxe ou hasard ! Loin de ces derniers, est assis un vieux du nom Packo Sangaré, avec un boubou blanc, dans un champ où les plants de maïs sont petits. Devant lui, une cuvette pleine d'épis de maïs qu'il épluche. Derrière lui, un champ de maïs aux feuilles sèches. Contrairement aux autres, le vieux moissonne. La galère et la faim sont loin de la porte du vieux Packo. « Qui a dit que la pluie ne s'est pas vite installée? Regardez derrière moi, mon maïs est sec. J'en vends et j'en consomme. Ce sont les gens qui se sont levés tard. Moi, je suis en train de moissonner et je suis assis dans mes jeunes plants de maïs », a lancé le vieux avec un air heureux. La joie se lisait sur son visage et sa voix allait jusque dans les cieux. « Moi en tout cas, je rend gloire à Dieu, car lorsque je semais, les gens me critiquaient. Ils pensaient que je ne savais pas ce que je faisais. Mais, ce qu'ils ont oublié, il faut souvent prendre des risques dans la vie. J'ai pris des risques et voilà les résultats. Mon premier champ est prêt et le second est au même niveau que ceux des gens qui me traitaient de vieux fou », a largement commenté le vieux avec un sourire timide et chaque fois, sa femme, assise sous un arbre, ne faisait que corroborer ses propos.
La saison hivernale 2013-2014 se trouve dans une situation d'incertitude, au regard de l'état des champs. Mais, comme l'ont reconnu les agriculteurs eux-mêmes, il n'est pas encore tard, pourvu que le mois de juillet soit bien arrosé, et ce jusqu'à la fin de la saison.
Par Mady BAZIE