La BRVM a atteint en septembre son record de capitalisation à 6 283 milliards de FCFA. Basée à Abidjan en Côte d'Ivoire et crée en 1998, elle regroupe 8 pays d'Afrique francophone: Bénin, Togo, Burkina Faso, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Côte d'Ivoire. Elle occupe actuellement la 6ème place des 24 Bourses africaines, après celles de Johannesburg, Lagos, Le Caire, Casablanca et Nairobi. De nouvelles introductions dont Bank of Africa et Total Sénégal devraient lui permettre de renforcer son attractivité. Un fort potentiel que la BRVM est venue promouvoir à Paris le 30 septembre et 1 octobre lors des BRVM investment days.Entretien avec le Directeur de la BRVM, Edoh Kossi Aménounvé.
Afriqueinside : Est-ce la BRVM espère conclure l'année 2014 comme en 2013 sur une très forte capitalisation en hausse?
Je pense que nous sommes sur la bonne voie. Aujourd'hui nous sommes à plus de 6000 milliards de capitalisation et j'espère que nous allons finir l'année en hausse. Nous sommes dans une tendance qui se consolide. Si tout se passe bien nous devrions être en hausse par rapport à l'année dernière. Le premier facteur, c'est l'évolution des cours, si les cours progressent nous pouvons espérer une capitalisation en hausse, le second facteur concerne de nouvelles admissions et nous en attendons deux d'ici la fin de l'année.
Afriqueinside : Pourquoi les BRVM Investment Days ?
Les BRVM Investment Days sont tournées vers les investisseurs internationaux en portefeuilles en Afrique qui sont absents de la BRVM à la cote. Et cela pour quelles raisons?
Disons une méconnaissance de notre marché, des sociétés cotées ou encore une méconnaissance des mécanismes d'accès à notre marché de la BRVM. C'est pour cette raison que nous sommes venus à Paris pour les rencontrer. Aussi, nous sommes venus avec des émetteurs leur parler des perspectives d'activités, avec des intermédiaires boursiers venus leur expliquer comment on peut acheter des obligations sur notre marché.
Les émetteurs, nous les cherchons dans notre région d'abord à travers les privatisations et les fonds de private equity, et aussi des admissions volontaires. C'est un travail qui portera ses fruits dans les mois à venir.
Afriqueinside : Le bilan est positif ?
Le bilan est positif. Nous avons pu rassembler 250 personnes avec une cinquantaine de fonds présents sur la place de Paris qui sont venus nous écouter et nous sommes très contents de cette mobilisation.
Afriqueinside : Est-ce que la BRVM souffre encore d'une mauvaise image consécutive au scandale de détournement de fonds il y a deux ans ?
La confiance est vraiment retrouvée comme en témoigne l'engouement qu'a suscité cet événement. Nous avons améliorer notre image, nous avons oeuvrer de sorte que notre rôle soit mieux perçu comme acteur de l'économie. Et la place de la bourse dans un environnement émergent, en développement est compris. Vous savez la bourse est souvent perçue sur son volet plus secondaire d'échange de titres alors que sur les marchés émergents, notre rôle d'acteur du financement est plus fort car nous sommes en phase de financement de nos économies.
« Si nous n'avions pas hérité de ces 30 sociétés ivoiriennes, nous n'en serions pas là. »
Afriqueinside : La BRVM compte 37 sociétés cotées dont 30 sociétés ivoiriennes, est-ce que la prédominance des entreprises ivoiriennes n'est un frein à son rayonnement régional et continental ?
Ce n'est pas un frein, moi je dis toujours il ne faut pas rayer son histoire. C'est quand même important de vivre avec son histoire. La BRVM est née à un moment où la bourse des valeurs d'Abidjan a disparu donc nous avons eu de la chance d'hériter de 30 sociétés ivoiriennes cotées. Si nous n'avions pas hérité de ces 30 sociétés ivoiriennes, nous n'en serions pas là. Depuis la création de la BRVM, nous avons fait admettre une dizaine de nouvelles sociétés. Mais ces 30 sociétés ivoiriennes restent un atout. Le nombre de société compte mais la répartition de la capitalisation compte aussi et quand vous regardez les deux plus importantes capitalisations, celles-ci ne sont pas ivoiriennes mais sénégalaise et togolaise. On ne raisonne pas en terme de nombre mais de poids d'une société dans la capitalisation. Néanmoins, je suis d'accord avec vous, il faut que le BRVM soit représentative de l'économie sous-régionale. Il faut que les sociétés de tous les pays viennent à la cote.
« L'épidémie d'Ebola ne va pas à elle seule remettre en cause ...la situation de croissance au sein de la CEDEAO, en Afrique de l'ouest. »
Afriqueinside : Est-ce l 'épidémie Ebola plombe les marchés ?
Il n'y a pas d'impacts directs sur les marchés. C'est une épidémie importante qui est venue gêner l'évolution de nos pays mais il y a une surréaction par rapport aux conséquences que cela doit avoir sur l'accélération de la croissance dans nos pays. Il faut rassurer les investisseurs internationaux, l'épidémie d'Ebola ne va pas à elle seule remettre en cause de façon fondamentale ou durablement la situation de croissance au sein de la CEDEAO, en Afrique de l'ouest.
Vous notez une fébrilité des investisseurs ?
Non absolument pas tout. Au niveau de la BRVM, pas du tout. Evidemment, on lit ici ou là que certains investisseurs internationaux tentent de ralentir leurs projets. Ce que nous voulons faire passer comme message, c'est que face à ces situations de crise, nous restons très serein. L'essentiel, c'est que l'on puisse avec l'appui des partenaires internationaux arriver à enrayer ces difficultés là. C'est un aspect très important. Vous savez, j'en ai parlé lors d'une conférence où j'étais invité à évoquer la gestion des risques d'investissements en Afrique. Les investisseurs internationaux nous ont dit, « que faites-vous ? » Ce à quoi j'ai répondu, « non la question doit être posée autrement : qu'est-ce que nous devons faire ensemble pour gérer les risques d'investissements en Afrique? » Il s'agit d'un effort commun. Si nous tous sommes convaincus qu'il y a une zone de croissance, et si il existe des difficultés, mettons nous ensemble ...
Est-ce les organismes et les dirigeants internationaux n'ont pas réagi trop tardivement face à Ebola?
« Ce qui est important, c'est qu'il y a une réponse en face et cela nous réjouit, cela rentre dans le cadre de la gestion commune des risques en Afrique. »
Afriqueinside : La BRVM point en 6ème position au classement des bourses africaines après après celles de Johannesburg, Lagos, Le Caire, Casablanca et Nairobi, ces bourses étaient présentes au dernier sommet USA-Afrique, pas vous, c'est étonnant pour une place boursière marquée par de réelles ambitions ?
Il s'agissait juste d'un conflit d'agenda. Nous avons été invités mais nous avions pris un certain nombre d'engagements qui ne nous ont pas permis de nous rendre sur place.
Pas de polémique donc ?
Non aucune. Parlons de nos ambitions. Comme l'a dit si bien Lionel Zinsou, il est important de rapporter la capitalisation de la bourse au PIBdes économies pour rendre compte des ordres de grandeurs. En Afrique, nous avons 24 bourses, les six premières sont les six premières économies du continent. Le Nigeria, le Maroc, l'Egypte, l'Afrique du Sud et le Kenya. Toute proportion gardée, il y a une logique, plus votre économie est développée, plus votre bourse est cotée. Le poids économique de l'UEMOA est plus important que le Kenya et moins importante que le Maroc, donc nous occupons logiquement la 5ème place des bourses continentales. Nous sommes une bourse qui reflète le poids économique de nos pays et qui a un impact réel sur la croissance. C'est pour cela que nous sommes restés dans ces proportions, dans notre stratégie de développement.
Afriqueinside : Où en est le projet de fusion de la BRVM avec Accra et Lagos ?
Ce n'est pas une fusion mais un projet d'intégration. Cela ne veut pas dire que les bourses vont disparaître. Ce projet, ce n'est que la mise en œuvre du projet politique et économique de la CEDEAO. Nous sommes dans un espace CEDEAO qui veut aller vers un marché commun intégré, une monnaie commune, un système financier commun.
« Nous intégrons déjà les éventuelles crises et difficultés. Si vous intégrez cela dans votre modèle économique, c'est un gage de réussite. »
Afriqueinside : Les projets d'intégration en Afrique, il y en a beaucoup ! Beaucoup de réussites mais d'échecs aussi, quelles sont les chances de concrétiser l'intégration des bourses ouest-africaines ?
En Afrique de l'ouest, l'UEMOA est un exemple de réussite, la CEDEAO aussi, on a des atouts pour être intégrer, je suis un fervent défenseur de l'intégration mais j'avoue que c'est plus facile d'intégrer techniquement nos bourses. D'un autre côté, il y a des contraintes réglementaires qu'il faut lever, des contraintes liées au dénouements des transactions, des flux de marchés.
Ce sera effectif à l'horizon 2020 ?
Nous travaillons sur ce calendrier.
Afriqueinside : Les perspectives de croissance dans la zone UEMOA sont très positives, cette embellie devrait se consolider selon vous ?
Absolument nous avons des atouts pour cela. Ce que je tiens à souligner, c'est qu' aujourd'hui, nous intégrons déjà les éventuelles crises et difficultés. Si vous intégrez cela dans votre modèle économique, c'est un gage de réussite. On peut anticiper , nous avons une meilleure lecture des clefs de notre croissance et nous savons comment réagir.
Afriqueinside : Une embellie portée notamment par la relance de l'économie ivoirienne, appréhendez-vous les prochaines échéances électorales de 2015 en Côte d'Ivoire ?
Pas du tout nous pensons que cela va bien se passer, nous n'avons pas d'appréhensions.