Coup de sang des Burkinabè de Côte d'Ivoire : Le Faso n’a pas besoin de ça

| 10.03.2015
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Coup de sang des Burkinabè de Côte d'Ivoire : Le Faso n’a pas besoin de ça
© DR / Autre Presse
Coup de sang des Burkinabè de Côte d'Ivoire : Le Faso n’a pas besoin de ça
Pas besoin de faire un dessin au ministre de l'Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité, qui mesure à quel point beaucoup de nos concitoyens en Côte d'Ivoire sont remontés contre la décision des autorités burkinabè, de remettre à demain (probablement en 2020) leur droit de vote à la présidentielle. De fait, le Collectif des associations et mouvements de jeunesse burkinabè en Côte d'Ivoire (CAMJBCI) n'a pas fait dans la dentelle. Il a décidé de tout foutre en l'air, et c'est le moins que l'on puisse dire, en interrompant de manière violente, une cérémonie organisée hier, 9 mars au Consulat général du Burkina en Côte d'Ivoire, et présidée par le ministre Auguste Barry.

Une cérémonie s'inscrivant dans le cadre d'une tournée que ce dernier effectue dans la sous-région et dont l'objet justement est d'expliquer à la diaspora burkinabè, les raisons du report de leur vote. Pour l'étape ivoirienne de la tournée, et bien, c'est raté ! Elle s'est soldée par le coup de sang de la CAMJBCI, qui s'est traduit par le saccage des tentes dressées pour l'occasion, et le renversement des chaises avec à la clef, le départ précipité du ministre Barry, qui n'a dû son salut qu'à l'intervention des forces de sécurité. Certes, l'on peut comprendre l'état d'esprit actuel de ces Burkinabè, qui n'apprécient guère le fait d'avoir été mis sur la touche au sujet du scrutin d'octobre prochain. Mais pour autant, était-ce la meilleure façon de s'exprimer ? Et plus grave, on peut dire que les kaouswéogo ont fini par perdre les bonnes manières. Car, la bienséance aurait quand même voulu que, par courtoisie, ils écoutent au l'hôte du jour, qu'ils prennent connaissance des arguments du ministre et, éventuellement, en mesurent la pertinence quitte ensuite à opposer les leurs. C'est du reste, ce sens de l'écoute dont ont fait montre que les précédents interlocuteurs de Barry, au Mali notamment. Ils n'en sont pas diminués. Bien au contraire, de leurs échanges avec la délégation burkinabè, on peut dire que certains en sont sortis rassurés voire édifiés, si l'on en juge du reste par les propos de quelques uns.

Or, en Côte d'Ivoire, le film des événements s'est déroulé dans un scénario tout autre. Comme si, dès le départ, la volonté de rompre en visière avec le ministre et sa délégation avait été clairement affichée. A preuve, à peine la cérémonie a-t-elle commencé que tout a été mis sens dessus dessous. Assurément, cette image que renvoie la diaspora burkinabè en terre d'Eburnie, est désastreuse. Elle n'est, en tout cas, pas à son honneur.

Et puis, cette façon de se singulariser des autres, laisse plus que songeur. Les autres Burkinabè de l'étranger ne sont certainement pas moins mécontents. Mais ils se sont gardés de toute violence. Ils n'ont pas donné l'image de Burkinabè préférant l'argument de la force à la force de l'argument. Or, rien ne les en empêchait.

Cela dit, on ne peut se priver de se poser cette question : pourquoi ces Burkinabè de Côte d'Ivoire tiennent-ils tant à prendre part à un vote pour lequel tous ou presque s'accordent à dire que techniquement, toutes les conditions ne sont pas réunies pour la prise en compte des Burkinabè de l'extérieur ? Certes, la Côte d'Ivoire compte la plus grande communauté de Burkinabè. Certes, leur droit de vote est inscrit dans la Constitution. Mais au regard des difficultés relevées sur le terrain, en termes de timing notamment, est-il possible de vouloir que la plus belle femme au monde donne plus que ce qu'elle a ? Il faut savoir raison garder. Toujours est-il que ce n'est pas en agissant ainsi que le CAMJBCI parviendra à ses fins. Ce n'est pas en s'en prenant à l'autorité, qu'il forcera la main à l'Etat burkinabè. Enfin, le CAMJBCI doit se convaincre qu'une telle décision n'a pas été prise à la légère. Il devrait, une fois, pour toutes, avoir le courage et l'humilité de l'accepter. L'intérêt du Burkina doit primer sur leurs intérêts personnels et peut-être inavoués. Le Burkina n'a pas besoin de cela.

« Le Pays »

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