Cinéma d’animation : « On récupère toujours au moins ce qu’on y investi » (Serge Pitroipa)

| 24.03.2015
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Cinéma d’animation : « On récupère toujours au moins ce qu’on y investi » (Serge Pitroipa)
© DR / Autre Presse
Cinéma d’animation : « On récupère toujours au moins ce qu’on y investi » (Serge Pitroipa)
Moins présent dans l'univers cinématographique burkinabè que la prise de vue réelle, le Cinéma d'Animation est en quête de ses lettres de noblesse au pays des hommes intègres. Ses contraintes, ses avantages ainsi que les actions entreprises pour sa promotion dans cet entretien accordé à Sidwaya par le Réalisateur Serge Pitroipa, président de l'Association burkinabè du cinéma d'animation.


Sidwaya (S) : Qu'est-ce que le cinéma d'animation ?

Serge Pitroipa (SP) : Le cinéma d'animation regroupe plusieurs techniques dont le dessin animé, le stop motion, l'animation de l'image de synthèse 3D, etc. Le dessin animé consiste en l'animation du dessiné qui s'est fait soit directement par l'ordinateur ou encore sur support papier. Le stop motion c'est l'animation grâce aux marionnettes. Les marionnettes sont confectionnées à l'aide de carton ou d'argile et placées dans un décor 3D. La caméra est ensuite positionnée et branchée à l'ordinateur pour la capture image par image. C'est la succession des photos mises ensemble qui donne l'animation. Pour l'image de synthèse, on utilise beaucoup plus l'ordinateur ce qui fait que cette technique est essentiellement informatisée.

S : Comment se fait la réalisation d'un film d'animation ?

SP : Pour ce faire, il faut toujours avoir une bonne histoire, d'où l'importance du scénario. Après l'histoire, les financements pour la production du film. Ensuite vient l'étape de la recherche de personnages et des décors. A la suite de cette phase de pré production nous avons celle de production où interviennent les animateurs, décorateurs, etc. La troisième partie que s'appelle le ''compositing'' consiste en la mise ensemble des décors et de l'animation pour avoir tout le film. Passée cette étape, on en vient au montage qui permet de réunir l'image et le son et pour finir on procède au mixage et à l'étalonnage (harmonisation de la coloration et de la luminosité des différents plans d'un film) de tout ceci.

(S) :Est-ce qu'il y a des aptitudes particulières pour la réalisation du cinéma d'animation?

SP : Je dirais que ce n'est pas exactement le même profil que pour le réalisateur évoluant dans la prise de vue réelle. Nous avons été formés pour ce qui me concerne et c'était une première ici, par la télé de Bruxelles en collaboration avec la direction de la cinématographie nationale puis à l'institut Imagine et un peu plus tard au Kenya. C'est grâce à cette formation que je suis entré dans le cinéma d'animation parce que dans la sous région il n'y avait pas d'école qui forme spécifiquement dans le domaine. Après cela j'ai eu la chance avec l'appui de l'ambassade du Danemark de parfaire ma formation en Europe précisément à The Animation Workshop, une partie de VIA University College.

(S) : Quelle(s) appréciation(s) faites-vous du cinéma d'animation au Burkina Faso en tant que président de l'association burkinabè du cinéma d'animation ?

SP : Jusqu'à présent force est de constater que le cinéma d'animation n'est pas beaucoup connu au des Burkinabè. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'association a fait de la promotion de ce genre une priorité. Il s'agit pour nous de montrer qu'il est possible de produire des films d'animation à l'image de ceux que nous achetons à d'autres pays ici au Faso pour alimenter nos chaines sans être obligés d'aller voir ailleurs.

(S) : Le manque de financements constituent une préoccupation majeure pour le cinéma en général, qu'en est-il pour ce qui concerne particulièrement le cinéma d'animation ?

SP : Nous sommes confrontés au même problème avec la particularité que le cinéma d'animation coûte beaucoup plus cher que la prise de vue réelle. Je citerai par exemple le film «Pawit Raogo et la vieille menteuse » de Jean Pierre Tardivel et André Daniel Tapsoba. Avec cette production, c'est vrai que le ministère nous a énormément aidés mais nous avons dû recourir à des particuliers pour pouvoir la boucler. Les gens sont encore réticents à ce propos mais c'est parce qu'ils ignorent qu'ils ne risquent pas de perdre en y investissant car on récupère toujours au moins ce qu'on y met.

(S) : Quels en sont justement les avantages ?

SP : L'avantage c'est que le cinéma d'animation est très sollicité, on l'achète beaucoup plus. Elles sont nombreuses les chaines de télévisions qui réclament des films d'animation africains mais malheureusement il n'y a pas assez de productions dans ce sens. Concernant notre présente série « Afrogames » sur laquelle nous travaillons, plusieurs chaines nous ont déjà contactés pour savoir quand est-ce qu'elle sort mais nous sommes confrontés au problème de moyens. Cette manifestation d'intérêt nous encourage cependant à redoubler d'efforts dans la quête de moyens nécessaires pour sa production parce que nous avons la certitude qu'elle va bien se vendre dès sa sortie.

(S) : Parlant de votre association, quelles sont les actions de l'ABCA depuis sa création en 2009 pour la promotion de ce genre au Burkina Faso?

Disons que l'ABCA a pour objectifs entre autres de favoriser les échanges sur les films d'Animation avec des associations d'autres pays du monde à travers des festivals, des formations et des rencontres. Aussi, de servir de cadre de formation artistique à un nombre encore plus important d'enfants défavorisés, et d'accompagner les jeunes réalisateurs en voie de professionnalisation. En termes d'acquis il y a que nous organisons chaque année à l'occasion de la journée mondiale du cinéma d'animation le 28 octobre des projections en plein air afin de présenter les films africains et surtout ceux burkinabè. En dehors de ce cadre il y a la production des films. « ZoZo » dont je suis l'auteur est notre première production datant de 2009. Nous sommes présentement sur la série « Afrogames ».Nous avons aussi le film «Pawit Raogo et la vieille menteuse ». Nous avons également entre deux productions majeures, beaucoup de petits films à l'interne en dessin et en stop motion. Pendant les vacances nous donnons régulièrement des formations gratuites aux enfants désireux d'apprendre comment fabriquer un film d'animation. Il en est de même chaque 28 octobre à l'Institut français.

(S) : Quels sont les projets majeurs de l'association pour l'avenir ?

Nous avons en perspectives la création d'un centre de formation professionnelle en cinéma d'animation, la mise en place au Faso d'un festival international de film d'animation, etc. Mais actuellement nous avons notre campagne qui est lancée pour notre série « Afrogames » sur le site www.indiegogo.com/projects/afrogames-burkina-animated#home Nous sommes présentement à 2400 dollars et nous espérons que les gens continuerons à investir pour que le deuxième épisode voit très prochainement le jour.

Propos recueillis par Voro KORAHIRE

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