Une cinquantaine d'années après l'indépendance, quel constat peut-on faire de l'état des lieux? Sur le plan du développement, les résultats ne sont guère reluisants, même si des efforts ont été fournis. Le pays est toujours accroché au dernier rang dans le classement annuel du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Cette triste réalité est perceptible sur le terrain. Une écrasante majorité de Burkinabè croupit dans la misère, la pauvreté, la paupérisation à côté d'une minorité de privilégiés qui vivent dans le luxe.
Dans le domaine de la gouvernance, le pays a été plus dirigé par le «pouvoir kaki», notamment les militaires. Excepté le premier président de la République, feu Maurice Yaméogo, et dans une moindre mesure, le président de la Transition, Michel Kafando, le «naam» (pouvoir) a été géré par des hommes de tenue. On peut citer le général Aboubacar Sangoulé Lamizana, le colonel Saye Zerbo, le médecin-commandant Jean-Baptiste Ouédraogo, le capitaine Thomas Isidore Noël Sankara et le capitaine Blaise Compaoré. C'est ce dernier (Blaise) qui avait engagé le pays dans la voie démocratique.
En effet, après sa prise de pouvoir en 1987 par un coup d'Etat, le capitaine Blaise Compaoré s'est vu obligé, sous la pression des dirigeants l'ancienne métropole (la France), d'adopter le retour à une vie constitutionnelle normale. Ce mode de gouvernement (la démocratie) a été, on se souvient, en vogue, après le discours de la Baule prononcé en 1990 par le président français de l'époque, François Mitterrand. Celui-ci obligeait pratiquement les chefs d'Etat africains à emprunter la voie du processus démocratique, seule condition pour bénéficier de l'aide au développement. C'est dans ce contexte que le Burkina Faso s'est inscrit dans la dynamique en 1991 avec l'adoption d'une Constitution qui sera modifiée au fil du temps.
De nos jours, on constate que ce processus de démocratisation est sur la bonne voie, sinon en marche, en dépit des multiples insuffisances liées. Pour preuve, des élections municipales, législatives et présidentielles sont régulièrement organisées, même si la transparence de ces scrutins reste discutable. La liberté d'opinion, de parole et d'expression, de manifestation, etc. reconnue dans la Constitution est quelque peu respectée. Cela a été justement le fruit de la lutte des populations qui se sont battues, parfois au prix de leur vie, pour plus de justice, de liberté, d'égalité, de démocratie.
En outre, le peuple s'est mobilisé, à chaque fois que de besoin, pour empêcher la dérive des autorités à protéger leurs intérêts. Le soulèvement populaire des 30 et 31 octobre derniers qui a conduit à la chute de Blaise Compaoré en est la preuve.
Il est de même de celui du 3 janvier 1966 qui avait aussi contraint le président Maurice Yaméogo à quitter le pouvoir. On peut donc dire qu'en 54 ans d'accession à la souveraineté nationale et internationale, le peuple burkinabè a été, sans doute, la vedette, le héros, la grosse satisfaction. Ce peuple est intervenu 2 fois (en 1966 et en 2014) pour stopper les ambitions démesurées et la boulimie du pouvoir des dirigeants.
Le président déchu, Blaise Compaoré en particulier, n'a pas travaillé à faire du Burkina Faso un pays émergent, comme il l'avait promis dans son programme «Bâtissons ensemble un Burkina émergent». C'est pourquoi, son départ du pouvoir suscite beaucoup d'espoir pour les Burkinabè qui aspirent au changement, au bien-être et au développement socio-économique.
Cet espoir est permis, au moment même où se déroulent, aujourd'hui 11 décembre, les festivités du 54eanniversaire de l'Indépendance. De nombreuses activités ont été organisées pour commémorer, de façon solennelle, cet événement. L'attraction de ces activités reste la cérémonie officielle commémorative à Dédougou, chef-lieu de la région de la Boucle du Mouhoun.
Le choix de cette ville s'inscrit dans la dynamique de la célébration tournante de la fête nationale. Il s'agit d'un choix politique et stratégique institué depuis 2007 par le gouvernement pour favoriser le développement des régions. Après Fada Gourma en 2008, Ouahigouya en 2009, Bobo-Dioulasso en 2010, Koudougou en 2012, Dori en 2013, c'est donc au tour de Dédougou, capitale de la région réputée être le grenier du Faso, d'accueillir la célébration.
Au moment même où cette fête bat son plein dans la «Cité de Bankuy», un vibrant hommage doit être rendu au peuple burkinabè. Aussi, faut-il souhaiter que vive éternellement «le Pays des Hommes intègres».
Après Dédougou, le regard sera tourné vers Kaya, le chef-lieu de la région du Centre-Nord, qui accueillera les festivités du 55e anniversaire.
En attendant, bonne fête de l'indépendance à tous les Burkinabè!
Les Echos du Faso